De gauche à droite: Eric Straumann, Philippe Richert, Gilbert Meyer, Charles Buttner, Guy-Dominique Kennel. Photo: Adriane Carroger/CUEJ
La majorité alsacienne (UMP-UDI) lançait lundi soir, à Colmar, sa campagne pour le «oui» au référendum du 7 avril sur la collectivité territoriale d'Alsace.
Ils étaient tous réunis, devant un public venu nombreux les écouter alors qu'ils lançaient lundi soir à Colmar la campagne pour le oui au référendum du 7 avril sur la collectivité territoriale d'Alsace.
En rang d'oignons, le président de la région, Philippe Richert, les présidents des conseils généraux du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, Charles Buttner et Guy-Dominique Kennel, ont expliqué les raisons de leur engagement en faveur de cette nouvelle collectivité. Derrière eux, les affiches de campagne déclinent les trois principaux arguments du «oui à l'Alsace le 7 avril» : «Economies, je dis oui, une collectivité au lieu de trois, ça coûte moins cher!», «Efficacité, je dis oui, une collectivité au lieu de trois, ça fonctionne mieux!», «Avenir, je dis oui, une collectivité au lieu de trois, ça va plus loin !»
Le «ni oui, ni non» de Gilbert Meyer
Mais auparavant, on attendait la position d'un homme, celle de Gilbert Meyer, le maire de Colmar. Jusqu'à présent, il avait manifesté ses réticences. Mais il ne s'était pas prononcé publiquement et avait promis de donner sa réponse au cours de la soirée. Mais Gilbert Meyer a préféré semer encore plus le doute sur ses intentions. «Je suis très inquiet de la portée juridique de la question» sur la fusion des trois collectivités. «Comme je comprends le texte, cette fusion entraîne la disparition des départements et de la préfecture du Haut-Rhin.» «Mais non!», s’exclament quelques membres dans l'assemblée. Philippe Richert lève les yeux au ciel tandis que le député Eric Straumann bout sur sa chaise. «C'est du Meyer tout craché», lâche un participant, énervé «des élucubrations» du maire de Colmar. D'ailleurs, Meyer a écrit à Manuel Valls pour qu'il «lui clarifie cette question essentielle». C'est donc en fonction de la réponse du ministre de l'Intérieur «sur le maintien de la préfecture à Colmar et des services déconcentrés» qu'il se positionnera sur la fusion des trois collectivités. Son discours, bien qu'applaudi, a été salué par quelques sifflets.
Et ils se sont mis à trois pour lui répondre. Eric Straumann, Guy-Dominique Kennel et Philippe Richert ont précisé que le texte porte sur les collectivités territoriales et non sur les circonscriptions administratives. A la tribune, Eric Straumann lance à l'assemblée : «Gilbert joue le rôle du méchant mais vous verrez, il va s'adoucir au fil de la soirée!» La salle s'esclaffe, le maire de Colmar se rembrunit. «Ne confondons pas collectivité et circonscription» demande Eric Straumann. «Evitons d'agiter d'anciennes peurs», lance Guy-Dominique Kennel. «Il n'y a pas de mauvaise interprétation et il n'y a donc pas à s'interroger d'une façon ou d'une autre sur le sujet», tranche Philippe Richert.
Philippe Richert a rappelé les enjeux du référendum du 7 avril. Photo: Adriane Carroger/CUEJ
« Un projet historique »
«Le 7 avril, ce n'est ni l'ouverture du paradis, ni la descente aux enfers», avance Charles Buttner. «Le 7 avril, c'est le début d'un travail de Titan», poursuit le président du conseil général du Haut-Rhin, Charles Buttner. S'il s'est prononcé en faveur de la fusion, c'est «pour chercher à être encore plus efficace» car selon lui, sa collectivité fonctionne déjà bien. En période de crise et de dotations à la baisse, «faire autant avec moins d'argent, ce sera déjà un exploit».
A la tribune, le président de la région est égal à lui-même, égrenant inlassablement ses arguments. Sa voix est un peu éraillée, une preuve de plus qu'il se consacre à temps plein à cette future collectivité, «ce projet historique». L'ancien ministre des Collectivités territoriales de Nicolas Sarkozy rappelle les bienfaits de la décentralisation sous la Vè République. Et d'en appeler à Charles de Gaulle, «ce visionnaire». En 1969, le président de la République avait proposé aux Français de se prononcer par référendum sur la régionalisation. Le «non» au référendum, alors que les Alsaciens, eux, avaient déjà dit «oui», entrainera la fin de la carrière politique du Général.
«Demain, avec la collectivité unique, on fusionnera les trois directions de la communication, les trois agences économiques et les trois agences touristiques. Ce qui nous permettra un gain d'argent et de visibilité», affirme le président Richert. «Le département verse le RSA, la région s'occupe de la formation professionnelle... Demain, il y aura un guichet unique», enchaîne-t-il enthousiaste. Selon lui, si le projet de l'acte III de la décentralisation n'est toujours pas connu, «c'est parce que le gouvernement est suspendu au vote des Alsaciens» et qu'il intégrera le cas échéant, les dispositions relatives à cette nouvelle collectivité. «Une première en France à l'image du Bade-Württemberg en 1952.»
Au final, beaucoup de mots, mais le montant des économies n'a pas été donné, et Philippe Richert a balayé d'un revers de main la question d'un participant sur la «super indemnité» que toucheraient les futurs conseillers territoriaux. Sur le cumul des fonctions, il s'est fait plus loquace : «Quand je suis devenu président de la Région, j'ai dit que je démissionnerai de mon poste de sénateur. Ce que j'ai fait, dont acte.»
En guise d'ultime avertissement, il a prévenu : «Ca se passe le 7 avril ou ça ne se passera pas.» La prochaine occasion de discuter de la fusion aura lieu effectivement en 2021, année du renouvellement des conseillers généraux et régionaux.
Adriane Carroger