Malgré des résultats en dessous de la moyenne nationale, la situation du suicide dans le Bas-Rhin reste préoccupante, d'autant plus qu'ils sont en hausse. Un phénomène qui touche davantage les hommes.
Une personne sur 14. C'est à peu près la proportion de Français qui reconnaissent avoir déjà tenté de mettre fin à leur vie. Et ils seraient 4,7% à avoir envisagé le suicide au cours des douze derniers mois. Ce résultat est le fruit de l'étude menée en 2017 par Santé publique France et publiée à l'occasion de la 23ème journée nationale pour la prévention du suicide. Une tendance en très légère baisse qui décrit une situation fortement contrastée selon le sexe, l'âge et la localisation géographique.
Légère hausse dans le Bas-Rhin
Deux paramètres sont à prendre en compte si l'on veut bien comprendre la réalité du suicide en France. Il y a d'un côté le nombre de décès pour cause de suicide et de l'autre le nombre d'hospitalisations suite à une tentative de suicide. Dans les deux cas, le Bas-Rhin est en dessous des moyennes nationales et régionales. Il y a eu en proportion deux fois moins de personnes hospitalisées suite à une tentative de suicide dans le département que dans le Grand-Est en 2015. Et le nombre de suicidés dans le Bas-Rhin est 30% inférieur au taux régional.
Pourtant, le taux d'hospitalisation dans le Bas-Rhin a presque doublé entre 2008 et 2017. « L'évolution catastrophique de notre société n'y est pas pour rien », explique Thérèse Jauffret, bénévole auprès de l'association SOS Amitié. « De plus en plus de gens se retrouvent en situation de chômage, de misère ou de précarité. » En 2018, l'association qui offre une écoute aux personnes en souffrance, a répondu à 22000 appels pour le seul bureau de Strasbourg. Mais par manque d'écoutants, seul un appel sur quatre a reçu une réponse, les autres sonnant dans le vide.
Plus de mortalité chez les hommes
Ce mal-être touche différemment les hommes et les femmes. Dans le Grand-Est, 811 personnes sont décédées en 2015 suite à un suicide. Parmi elles, plus de trois quart étaient des hommes. En cause : un recours plus systématique à la pendaison et aux armes à feu. Pourtant, les femmes ne sont pas moins touchées par les comportements suicidaires. « Beaucoup se retrouvent en situation de précarité, seules pour élever leurs enfants, explique Thérèse Jauffret, et elles souffrent énormément de cet isolement. » 61% des hospitalisations pour tentative de suicide entre 2015 et 2017 concernaient des femmes, qui ont davantage recours aux voies médicamenteuses.
La tranche d'âge des 15-19 ans présente, quant à elle le plus haut taux d'hospitalisation pour tentative de suicide. En 2018, l'ALT a reçu quelque 1500 jeunes en mal-être à travers le Bas-Rhin. Abus sexuels et violences ne sont pas les seules raisons de leur mal-être. « C'est un âge auquel les pressions de réussite scolaire sont fortes », explique Jérémie Stutz. « On impose parfois aux jeunes des choix qu'ils prennent comme des fatalités. »
L'association, qui intervient auprès des 11-25 ans, reçoit en moyenne un garçon pour trois filles, touchées différemment par le harcèlement, une des causes première du mal-être adolescent. « Les garçons règlent plus souvent ça par la bagarre, alors que les filles s'isolent », explique Jérémie Stutz. Selon lui, si son association reçoit de plus en plus d'adolescents, c'est parce que les hôpitaux publics « disposent de moins en moins de moyens pour les recevoir ». Alors les jeunes se tournent vers le monde associatif, d'autant plus dans les zones rurales où missions locales et autres services sociaux sont moins présents, au risque de passer hors des écrans radars.
Boris Granger