"Fac ouverte à tous les bacheliers !" La pluie et la grêle n'ont pas empêché les manifestants de prendre la rue. Plus de deux cent personnes ont manifesté à Strasbourg contre la loi sur le durcissement de l'accès à l'université et contre la plate-forme "Parcours sup", censée remplacer "Admission post-bac".
La jeunesse engagée a pris la tête d'un cortège où les syndicats d'enseignants étaient très présents. Crédit photo Cuej/Pierre-Olivier Chaput
C'est avec des tracts que la journée de mobilisation a commencé. À l'entrée des journées de l'Université, une dizaine de syndicalistes de Force Ouvrière, Solidaires, la CNT et la CGT ont tenté de dialoguer avec les lycéens amenés par bus entiers à ce salon consacré aux parcours post-bac. Et si peu d'entre eux ont fait l'école buissonnière pour rejoindre la manifestation, la distribution aura au moins contribué à lancer des discussions : "Mais c'est normal la sélection, non ?", demande l'un d'eux après avoir reçu le feuillet syndical. "En fait, non.", lui répond sa camarade, qui poursuit son argumentaire sur le chemin du centre des expositions.
Une fois le cortège formé, les manifestants partent vers le sud, direction le centre de Strasbourg. Très vite, les étudiants et lycéens prennent la tête du défilé et donnent de la voix."Ni tirage au sort, ni loi du plus fort !" : les slogans lancés au haut-parleur sont repris en choeur. Juste derrière, les enseignants mobilisés. Le rouge et le noir des drapeaux de Sud éducation sont les couleurs dominantes. FO, la CNT, la CGT et la FSU sont également de la partie. Le PCF, la France Insoumise et le NPA ferment la marche.
Le ciel s'éclaire enfin lorsque le cortège approche de la Bibliothèque nationale universitaire. Entre deux tournées de slogans, les manifestants discutent. Le parcours ne fait pas l'unanimité. Si l'utilité de s'adresser aux lycéens présents aux journées de l'université n'est pas contestée, le choix d'un court défilé dans des rues peu fréquentées est critiqué. Les plus déçus vont même jusqu'à parler d'une "manif' totalement pétée...".
Les portes du Palais universitaire ont été fermées à clef à l'approche de la manifestation. Crédit photo Cuej/Pierre-Olivier Chaput
La faible mobilisation n'a pas non plus échappé aux syndicalistes qui reconnaissent adhérents et encartés politiques. Sur les marches du Palais universitaire, point de chute officiel du parcours, le représentant de FO donne la marche à suivre : "Il faut retourner dans nos établissements, parler à nos collègues, organiser des assemblées générales, car la mobilisation ne fait que commencer." Un message repris par son homologue de Sud éducation, qui fustige une "menace à la démocratisation de l'enseignement supérieur". Reprenant l'"appel de Strasbourg contre la sélection", il incite le corps enseignant à saboter la mise en œuvre de la réforme, en mettant des avis positifs à tous les vœux des lycéens et refusant d'établir des pré-requis dans les départements universitaires.
Au Palais universitaire, les vigiles se sont enfermés pour empêcher les manifestants d'entrer. Ni une, ni deux, la banderole est re-dépliée, et un nouveau cortège d'une cinquantaine de personnes se forme. La manifestation sauvage prend la direction de l'université, par le boulevard de la Victoire. Suivis jusqu'au campus par des policiers en scooter, les manifestants se dirigent vers le bâtiment du Patio. Là aussi, les agents de sécurité ont prévu le coup : la porte principale est verrouillée, et bien gardée. Mais le bâtiment a plusieurs entrées. Rapidement, les manifestants se retrouvent dans le hall principal, mégaphone en main.
Une partie des manifestants s'est offert un deuxième parcours non déclaré jusqu'à l'Université. Crédit photo Cuej/Pierre-Olivier Chaput
Les vigiles, pris de cours, laissent les étudiants s'exprimer. Les slogans, tels que "Le plan étudiant, on n'en veut pas !", résonnent dans l'Université. Devant les étudiants présents, les manifestants rappellent leurs raisons de se mobiliser. Ils se dirigent ensuite vers les amphithéâtres les plus proches. Dans l'un d'eux, le visage d'Emmanuel Macron est projeté au tableau : "Le type que vous voyez au tableau est en train de détruire l'Université !", entend-on au mégaphone. Après le court exposé, retour dans le hall. Le prochain rendez-vous militant est annoncé : ce sera une assemblée générale, le 6 février.
Pierre-Olivier Chaput