Confronté à une opposition au sein de son propre camp, le gouvernement a fait passer son projet de loi par la procédure exceptionnelle de l'article 49.3 Une décision qui agite le monde politique.
Mardi 18 février, Manuel Valls à l'Assemblée avant l'annonce du recours au 49.3. (Photo: AFP PHOTO / PATRICK KOVARIK)
Au lendemain du passage en force du gouvernement sur la loi Macron, la tension est encore vive au sein du PS. "J'étais en colère hier à l'Assemblée nationale", a confié Emmanuel Macron mercredi matin sur BFM-TV. Le ministre de l'Economie a dénoncé l'opposition d'une partie de la gauche à sa loi, qui a contraint le Premier ministre à passer en force mardi. "Etre de gauche, c'est donner la possibilité d'aller plus haut", a-t-il asséné, réitérant les propos tenus la veille sur France 2 : "Ce qui compte, c'est la gauche qui avance parce que la gauche qui ne veut rien faire, elle ne sert à rien."
Mardi, le gouvernement, fragilisé par les dissensions dans son propre camp, a eu recours à la procédure exceptionnelle de l'article 49.3 pour éviter le rejet de la loi Macron. Le Premier ministre, Manuel Valls, a de nouveau justifié ce contournement du vote des députés, le soir même sur TF1 : "Nous ne pouvions pas jouer aux dés sur un texte aussi important. Je ne pouvais pas permettre qu'il y ait un échec."
Les frondeurs dans le viseur
Au sein du gouvernement, les critiques se sont concentrées sur les frondeurs. "Celui qui voterait la censure n'a plus sa place au Parti socialiste, a renchéri le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll ce mercredi matin sur Europe 1. Parce que voter avec l'UMP, pour des gens qui se disent de gauche, c'est quand même un problème majeur."
Avertissement inutile : les frondeurs avaient prévenu la veille qu'ils ne voteraient pas cette motion, tout en maintenant leurs critiques sur le texte. "La loi Macron n'est pas moderne. (...) C'est la loi du siècle précédent.", a ainsi déclaré mercredi sur Europe 1 Christian Paul, député de la Nièvre.
Le groupe communiste vivement critiqué à gauche
La position du groupe communiste (composante du Front de gauche), qui a annoncé vouloir voter la motion de censure aux côtés de l'UDI, de l'UMP et du Front national, a elle aussi été attaquée. "Le Front de gauche est dans une posture passéiste", a critiqué Emmanuel Macron sur BFM-TV mercredi matin. "Il y a une perte de repères dans la gauche de la gauche. On n'a pas connu ces attitudes depuis les années 1930, a regretté de son côté Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État chargé des Relations avec le Parlement, sur RTL. Il n'y a pas de mouvement social contre la loi Macron. Il n'y a que des postures et des sentiments de revanche à l'encontre de la gauche démocratique."
Le leader du Front de gauche Jean-Luc Mélenchon, très critique vis-à-vis de la loi Macron, a lui aussi attaqué le groupe communiste à l'Assemblée nationale, mais pour d'autres raisons. Ce mercredi matin, il a reproché à ses alliés de voter une motion présentée par la droite. "Si j'avais été député, je me serais adressé aux frondeurs, a-t-il expliqué sur France Info. Pour leur dire mes amis "il ne suffit pas d'être contre, il faut aussi être pour". J'aurais proposé aux frondeurs et aux écologistes de faire une motion de censure pour désapprouver le gouvernement, par la gauche, pas par la droite."
Invité de Jean-Jacques Bourdin mercredi matin, le député communiste André Chassaigne a expliqué le choix de son groupe. "C'est notre seule possibilité de montrer notre position résolue contre la loi Macron, a-t-il déclaré sur RMC. Et si la motion de censure est votée, il n'y aura pas forcément une dissolution de l'Assemblée, mais la constitution d'un autre gouvernement qui ferait vraiment une politique de gauche."
Alexis Boyer et Jonathan Klur