Le plus grand pays musulman du monde souhaite faire revenir ses ressortissants ayant accepté des travaux jugés dégradants à l'étranger. Outre sa faisabilité, cette politique pose la question de l'avenir de ces travailleurs.
Joko Widodo, le nouveau président Indonésien à la rencontre de la population près de Jakarta en 2013. Photo CC http://id.wikipedia.org/wiki/Berkas:Jokowi_blusukan.jpg
Donner un billet retour aux Indonésiens partis faire des travaux subalternes à l'étranger. C'est le défi que s'est lancé le nouveau président de la République indonésienne, Joko Widodo, en déplacement en Malaisie jeudi dernier. « Il y a trois pays qui approvisionnent le monde en travailleurs domestiques. Nous en sommes un en Asie. C'est une question de dignité. C'est vraiment dégradant » a-t-il déclaré, des propos rapportés par Antara, l'agence de presse officielle du gouvernement indonésien.
L'étiquette de pays fournisseur de main d'oeuvre pour travaux à bas coûts parasite la diplomatie avec les pays voisins, selon le chef d'Etat, qui s'exprimait lors d'une tournée de plusieurs pays de l'Association des nations de l'Asie du sud-est (Asean).
Au moins 1,2 million de travailleurs clandestins
Joko Widodo a été élu le 20 octobre sur un programme en trois points : maintenir la souveraineté de l'Indonésie, renforcer la protection sociale des citoyens et intensifier la diplomatie économique. Le choix de rapatrier les travailleurs domestiques touche ces deux derniers. Beaucoup de ces travailleurs partent à l'étranger pour toucher un meilleur salaire qu'en Indonésie et faire vivre leur famille restée sur place. Mais leur retour poserait la question de l'intégration d'une population non qualifiée dans un marché du travail marqué par un taux de chômage de plus de 6 % en 2014 (chiffre Les Echos).
Une population qui se compte en millions. Il est difficile d'évaluer précisément le nombre de travailleurs indonésiens émigrés. Le président s'appuie sur un rapport les estimant à 2,3 millions de travailleurs émigrés dont 1,2 seraient sans papiers, ce qui en fait une population très vulnérable. L'Organisation internationale du travail estime de son côté que la réalité est plus proche du double de ces chiffres, selon The Diplomat.
Huit cent travailleurs ont déjà été rapatriés, d'autres vont suivre », a précisé Joko Windodo, rapporte Antara. L'objectif à court terme est d'en faire revenir 1800. Des premiers objectifs mesurés et pour cause. Ni le président, ni la ministre des Affaires étrangères Retno Marsudi, n'ont explicité les moyens mis en œuvre pour appliquer cette politique. Un groupe de travail spécialement affecté à cette question va être créé et placé sous l'autorité du vice-ministre des Affaires étrangères a indiqué Retno Marsudi lors d'une conférence de presse.
Nicolas Skopinski