Le rapport parlementaire Fauvergue-Thourot propose de rendre l’armement obligatoire pour la police municipale. Il a été remis mardi 11 septembre au Premier ministre, Edouard Philippe.
« Nous ne devons rien nous interdire », avait déclaré le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, le 19 décembre, à propos de la sécurité intérieure. Message bien par reçu Jean-Michel Fauvergue, député de la Seine-et-Marne et ex-patron du RAID, et Alice Thourot, députée de la Drôme. Les deux députés LREM chargés de la mission parlementaire de « coproduction de sécurité » envisagent des changements drastiques dans le Code de la sécurité intérieure.
Un des 78 points du rapport envisage notamment de rendre l’armement des 21 500 policiers municipaux en France obligatoire , « sauf décision motivée du maire ». Cette proposition s’inscrit dans la continuité du décret de 2016, autorisant les policiers à porter des pistolets semi-automatiques. Mais elle est plus radicale encore, puisque pour le moment, le port d’arme est facultatif et dépend exclusivement du maire, qui doit demander l’autorisation du préfet (L.412-51 du Code des communes).
De plus en plus de policiers armés
D'après le rapport, en 2016, 84% de policiers municipaux disposaient déjà d’une arme, quelle que soit sa catégorie (de la bombe lacrymogène au calibre 38), soit 18 000 agents. Parmi eux, 44% étaient déjà équipés d’une arme à feu, soit 9 500 agents. Les attentats terroristes de 2015 sont la principale raison de cet important armement de la police municipale, notamment dans des grandes villes comme Dunkerque, Toulouse ou Versailles.
Jusqu’à maintenant, la police municipale était chargée de la sécurité du quotidien (missions de prévention, de surveillance du bon ordre, de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publiques). Avec le rapport Fauvergue-Thourot, les compétences des policiers municipaux seraient aussi élargies. Ils pourraient désormais consulter le fichier des objets et des véhicules signalés (FOVeS) qui permet de faciliter les recherches et les contrôles pour des objets ou des véhicules volés ; et également le fichier des personnes recherchés (FPR), qui recense les personnes faisant l'objet d'une mesure de recherche ou de vérification de leur situation juridique.
Les élus pourraient également confier aux policiers municipaux de nouvelles missions : faire respecter des arrêtés, fermer certains établissements, intervenir sur les ivresses publiques, ou encore sanctionner par des amendes la consommation de stupéfiants.
Des réactions contrastées
Le rôle de la police municipale se rapprocherait désormais davantage de celui de la police nationale. Un processus qui inquiète Christian Métairie, maire EELV d’Arcueil (Seine-et-Marne), ce matin au micro de Franceinfo.
D’autres maires, au contraire, défendent le port d’armes pour tous les policiers municipaux. C’est le cas de Bruno Beschizza, maire LR d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), qui indique dans un article Franceinfo : « J’espère qu’enfin les professionnels de terrain seront entendus ». Dans un tweet, le sénateur des Alpes-Maritimes, Henri Leroy, soutient également le rapport tout en rappelant la nécessité d’une formation adaptée.
La formation existe déjà M. Le Sénateur - vous le savez - l'armement des PM est extrêmement bien encadré.
— SD POLICE MUNICIPALE (@SDPM_MICHEL) 11 septembre 2018
Le Syndicat de Défense des Policiers Municipaux (SDPM) rappelle au sénateur que, aujourd’hui déjà, chaque agent armé doit impérativement avoir suivi une formation spécifique au préalable. Le rapport Fauvergue-Thourot va plus loin encore en envisageant la création d’une école nationale de la police municipale. Le SDPM a été reçu ce mardi 11 septembre au Ministère de l'Intérieur. Dans un communiqué, il se félicite de cette évolution « dans la mesure où il a toujours milité pour l'armement généralisé des policiers municipaux ». Une phase de concertation devrait se dérouler jusqu’à la fin de l’année, avant les premières conclusions du Ministère de l’Intérieur.
Phœbé Humbertjean
Image de bandeau: Pablo Tupin-Noriega