Malgré les débats, les enchères pour l'attribution des premières fréquences de la 5G doivent se tenir fin septembre. © Photo Nicolas ASFOURI/AFP
Alors que maires de gauche et écologistes demandent un moratoire pour le déploiement de la 5G, le gouvernement persiste. Cuej.info revient sur les inquiétudes d'une partie de la population.
À quelques semaines des enchères pour l'attribution des premières fréquences de la 5G en France, le débat ne retombe pas. Dimanche, près de 70 maires écologistes et de gauche signaient une tribune dans le JDD demandant un moratoire jusqu'à l'été 2021, se faisant le miroir des craintes d'une importante partie de la population. Emmanuel Macron maintient le cap, comparant les opposants à la 5G aux Amish, communauté religieuse vivant en marge de la société.
Cuej.info revient sur la polémique en trois questions.
Barbara Pompili, la ministre de la Transition écologique, affirmait ce mercredi sur Europe 1 qu'il n'y avait pas besoin de retarder l'arrivée de la 5G. Son argument ? Le rapport remis la veille au gouvernement par le Conseil général de l'environnement et du développement durable, l'Inspection générale des affaires sociales, l'Inspection générale des finances et le Conseil général de l'économie. Celui-ci s'appuie sur des études publiées depuis les années 1950 dans une vingtaine de pays. Il assure que les radiofréquences ne présentent pas d'effets néfastes avérés à court terme sur la santé en dessous des valeurs limites d'exposition recommandées par la Commission internationale de protection contre les rayonnements non ionisants (ICNIRP). Les éventuels effets à long terme, cancérogènes ou non, restent non avérés. Une zone d'ombre perdure donc, suffisamment en tout cas pour que des débats persistent dans la communauté scientifique.
Dans son rapport préliminaire sur l'exposition de la population aux champs électromagnétiques publié en octobre 2019, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), incitait déjà à la prudence. L'agence a notamment mis en évidence un manque de données scientifiques sur les effets biologiques et sanitaires potentiels liés à l’exposition aux fréquences autour de 3,5 GHz. Les résultats de ses travaux ne seront disponibles qu'au premier trimestre 2021.
La Convention citoyenne et les maires de gauche et écologistes ont tour à tour appelé à ne pas sacrifier la question environnementale sur l'autel de la 5G. Si une antenne 5G consomme trois fois plus qu'une antenne 4G, elle produit 15 fois plus de débit, ce qui la rend nettement moins énergivore. Les opposants à la 5G prédisent cependant un "effet rebond" : un accès plus rapide aux données pourrait pousser à la consommation, ce qui compenserait les économies d'énergie réalisées. Conséquence plus certaine de l'implantation de la 5G, les smartphones vont devoir être remplacés pour être compatibles avec cette nouvelle technologie. Le groupe de réflexion Shift Project estime de l'ordre de 15% l'augmentation de la vente de smartphones à cause de la 5G dans les années à venir. Or nos téléphones portables représentent 81% des impacts environnementaux du numérique. Leur remplacement aurait pour conséquence une accélération de l'exploitation des ressources naturelles non renouvellables, de la pollution due à l'extraction des métaux rares et la génération de quantité de déchets.
Dans un rapport de juillet 2019, l'Agence nationale des fréquences (ANFR) mettait en avant plusieurs utilisations de la 5G. Fonction la plus instinctive, elle devrait nous permettre de bénéficier d'un ultra haut débit, avec des téléchargements quasi instantanés. Mais elle devrait aussi servir à la communication entre objets connectés, permettant la rationalisation des ramassages de déchets ou des économies d'énergie dans les villes intelligentes, ou des opérations chirurgicales à distance. Autre cas de figure : la 5G serait nécessaire pour réaliser des communications critiques nécessitant un temps de réponse extrêmement bref. Une utilisation propre aux véhicules autonomes ou aux services de sécurité et d'urgence, par exemple.
Marion Henriet