Détection, prévention et réaction sont les mots d’ordre du plan interministériel de lutte contre le harcèlement scolaire, présenté ce mercredi 27 septembre.
En 2021 et 2022, sept victimes de harcèlement sur dix ont gardé le silence. Crédit : rawpixel.com sur Freepik
Réseaux sociaux coupés, téléphones confisqués… Alors que deux nouvelles interpellations pour suspicion de harcèlement viennent d’avoir lieu dans un lycée de Vendée (Pays de la Loire), le gouvernement passe à l’offensive. Élisabeth Borne et Gabriel Attal ont présenté ce mercredi à 16h30, en Conseil des ministres, un plan interministériel anti-harcèlement scolaire. Des mesures qui viseraient à éviter les actes désespérés, à l’image de ceux survenus ces derniers mois, et plus récemment il y a trois semaines, avec le suicide de Nicolas à Poissy.
Pourcentage d'atteintes répétées subies par les victimes d'harcèlement. Crédit : enquête de la DEEP (Direction de l’évaluation et de la prospective et de la performance)
Gabriel Attal, qui fait du harcèlement scolaire l’une de ses priorités depuis son arrivée à l'Éducation nationale en juillet, s'est rendu au rectorat de Versailles, au cœur d’une polémique après la mort de Nicolas, pour annoncer le slogan phare de ce nouveau plan : « 100 % prévention, 100 % détection, 100 % réaction ». Alors concrètement, quels sont ces trois axes majeurs ?
« 100 % prévention » : s’inspirer de la méthode danoise
En visite au Danemark le vendredi 22 septembre, Gabriel Attal a étudié les mesures de lutte contre le harcèlement scolaire mises en place dans les écoles danoises et dit souhaiter « s'en inspirer ». Le pays scandinave, avec la Suède et l'Islande, est en tête des pays d'Europe où le taux de harcèlement scolaire est le plus bas, selon une enquête réalisée en 2022 par l'Institut d'État pour la santé publique.
Depuis quelques mois, la méthode éducative Fri For Mobberi, qui signifie « libéré du harcèlement », est expérimentée en France. Elle fait son arrivée en septembre dernier dans les écoles maternelles des cités éducatives du XVIIIe arrondissement de Paris et de Saint-Ouen-sur-Seine (Seine-Saint-Denis). Le but est de privilégier la sensibilisation dès le plus jeune âge, notamment à travers des ateliers où les enfants apprennent à être plus à l'écoute avec leurs camarades de classe. Le ministère de l'Éducation nationale prévoit de populariser cette méthode dès la rentrée 2024 avec des « cours d’empathie ».
Gabriel Attal envisage aussi la mise en place d'un temps dédié pour parler du harcèlement dans tous les établissements scolaires : ce sera le 9 novembre, lors de la journée nationale de lutte contre le harcèlement. À cette occasion, deux heures seront banalisé afin de mettre en place des actions spécifiques au sein même des établissements.
« 100 % détection » : repérer et responsabiliser
Pour mieux repérer les situations de harcèlement, l’exécutif prévoit d’élaborer une grille d’auto-évaluation, à tous les élèves du CE2 à la 3e, distribuée le 9 novembre, qu’ils pourront remplir afin de se situer sur une échelle du harcèlement. Cette grille, qui débutera par des « signaux faibles », sera le fruit d’échanges menés avec des spécialistes de l’enfant. Le dispositif Phare (Plan de prévention du harcèlement à l'école) lancé en 2021 dans les écoles et collèges, et généralisé aux lycées depuis la rentrée, sera aussi renforcé. De ce fait, des brigades anti-harcèlement pourraient aussi voir le jour dans les 30 académies de France. Elles seront composées de psychologues et de fonctionnaires formés à soutenir les chefs d'établissement en cas de crise et d’élèves ambassadeurs qui auront un rôle de surveillance au sein des classes. Des cellules dédiées au harcèlement seront mises en place dans tous les rectorats.
« 100 % réaction » : agir contre le cyberharcèlement
En plus de ces mesures déjà existantes, le gouvernement veut s’attaquer au fléau du cyberharcèlement, qui constitue un axe majeur du plan interministériel. Gabriel Attal prévoit d’interdire l’utilisation des réseaux sociaux pendant 6 mois pour les jeunes reconnus coupables, voire un an en cas de récidive. Il a aussi évoqué la mise en place d’un couvre-feu numérique (de 18 h à 8 h) et la confiscation du téléphone portable pour les jeunes identifiés comme auteurs de cyberharcèlement grave, dès le début de la procédure judiciaire. Le ministère de l’Éducation nationale veut aussi empêcher les moins de 15 ans de s’inscrire sur les réseaux sociaux sans accord parental, au travers d’un texte de loi, adopté par le Parlement en juin dernier. Elisabeth Borne a annoncé la saisine « systématique » du procureur de la République en cas de signalement de harcèlement, notamment grâce à une plateforme dédiée entre l'Éducation nationale et la Justice. En conclusion des mesures, Gabriel Attal lance, « moins de harcèlement et plus de bonheur à l'école ».
Écrit par Esther Suraud
Édité par Jade Lacroix