Le froid tombe à pic pour certains agriculteurs, qui l'attendaient depuis longtemps. S'il tue une partie des parasites, il contraint aussi les cultivateurs à changer quelque peu leurs habitudes.
Les serres de l'Îlot de la Meinau disposent d'une double paroi pour mieux isoler du froid. Crédit photo : Baptiste Decharme/CUEJ
Le nez qui coule, les membres qui grelottent, l'envie de tartiflette : c'est ce qui se passe quand on a froid. Mais la vague de froid a aussi des conséquences sur les cultures. Choux, fraises ou encore vignes sont touchées par les températures négatives, et pas uniquement dans le mauvais sens.
« Bah… ça gèle », répond, souriante, Capucine Ott, à l'îlot de la Meinau, une ferme urbaine de Strasbourg, quand on lui demande quels sont les effets du froid sur les cultures. Sous ses 6 000 mètres carrés de serres, la température est bien plus agréable que sur la terre gelée de l'extérieur. La double paroi y est pour beaucoup.
Les plantes les plus fragiles – comme la mâche, ou les épinards – y sont cultivées. Les pissenlits, pour éviter le gel et conserver un peu d'humidité, sont sous bâche. Les pommes de terre déjà récoltées sont mises à l'abri, au chaud : en dessous de 5°C, elles deviennent sucrées et impropres à la consommation.
Des températures dignes d'un février alsacien
« Il n'y a pas vraiment de changement dans le travail. Pour les récoltes, il faut attendre que ça dégèle. » Ce n'est pas trop pour les cultures que les cultivateurs s'inquiètent. « C'est plus difficile pour nous que pour les plantes », plaisante Capucine Ott. Cette année, les tuyaux n'ont pas gelé, mais l'année dernière, alors que les températures avaient aussi plongé fin janvier, il avait été impossible d'arroser pendant plusieurs jours.
En fait, les températures négatives sont plutôt habituelles à cette période de l'année, et s'avèrent presque une bénédiction pour certains agriculteurs. « Le froid était attendu », indique Johanna Bodendorfer, conseillère à l'association de producteurs Planète légumes. « Février est toujours le mois le plus froid. Ce n'est pas une inquiétude. Si on était mi-avril, ça aurait été autre chose. Les plantes auraient commencé à pousser. Si la fleur du fraisier gèle, par exemple, elle ne refleurit pas après. »
Même constat du côté des vignobles. Les vignes sont capables de tenir jusqu'à -20°C tant qu'elles sont « au repos », l'hiver. Elles attendent même d'avoir atteint une certaine durée de température froide avant de se réveiller, explique Jérôme Attard, technicien spécialisé dans la viticulture à la chambre d'agriculture d'Alsace.
Tuer la petite vermine
Le froid présente en outre quelques avantages. « Il fait le ménage au niveau des insectes ravageurs », avance Jérôme Attard. Un constat que relativise cependant Johanna Bodendorfer : « Souvent, on le dit, mais je n'y crois pas trop. Les insectes auxiliaires [insectes bénéfiques pour les plantes, comme les coccinelles, ndlr] souffrent autant que les parasites. »
Certains cultivateurs en profitent aussi pour travailler la terre. « On peut aussi labourer les champs. Ça fait exploser l'humidité et la terre est plus granuleuse », explique la conseillère. Une bonne manière de préparer les cultures au redoux qui arrive.
Baptiste Decharme