Le nombre de travailleurs frontaliers est en augmentation constante, selon un rapport de l'Insee, publié cette semaine. C'est vrai pour la Suisse, le Luxembourg ou encore la Belgique, mais pas pour l'Allemagne, ce qui touche l'Alsace en priorité.
L'étude de l'Insee sur les travailleurs frontaliers est de nature à inquiéter les Alsaciens. Tandis que le nombre général de Français qui traversent les frontières pour aller travailler (en Suisse,Belgique et au Luxembourg) augmente sans cesse, les Alsaciens vont de moins en moins en Allemagne, en tout cas entre 1999 et 2008. Ce phénomène s'explique par la crise économique et des difficultés linguistiques.
Parmi les quatre villes principales pourvoyeuses de frontaliers en Alsace, seule Wissembourg a connu une hausse de 200 entre 2006 et 2011. Sur la même période, Mulhouse a recensé un baisse de 200 personnes, Strasbourg en a perdu quelque 900 et Haguenau jusqu'à 1500.
Pour Patrick Schalck, directeur de la coopération transfrontalière de la Chambre de commerce et d'industrie de Strasbourg, il y a deux explications fondamentales. La concurrence croissante des travailleurs venus de l'Europe de l'Est, d'une part, mais surtout le départ à la retraite d'une génération de frontaliers, qui ont travaillé pendant 25 ou 30 ans en Allemagne.
Patrick Schalck cite le cas de l'équipementier Nussbaum de Kehl, dont 30 % des employés étaient français, il y a encore quelques années. Quand ces salaries sont partis à la retraite, "il a été difficile de les remplacer. Les jeunes Alsaciens ne parlaient plus assez bien allemand." Pour Patrick Schalck, ce problème linguistique est la principale raison de la baisse du nombre de frontaliers alsaciens outre-Rhin.
Mais depuis deux ans, "ça repart à nouveau". Les mesures politiques pour favoriser l'emploi transfrontalier donnent des résultats. A Kehl, le "Arbeitsamt" allemand s'est associé au Pôle Emploi français, le conseil régional d'Alsace a mis en place des formations techniques, adaptées aux demandes des entreprises allemandes, et des formations binationales ont été mises sur pied.
"Ce sont de bonnes mesures, approuve Patrick Schalck. En Allemagne, nous avons une pénurie de personnel spécialisé, en Alsace un taux de chômage de 25 % parmi les jeunes." Le nombre des frontaliers outre-Rhin devrait donc se redresser.
Manuel Fritsch