Sur les réseaux sociaux aussi, Jeanne Barseghian est moins suivie que ses rivaux. Son compte Twitter personnel n’atteint même pas les 800 abonnés, un nombre largement inférieur à celui de l’influent Alain Fontanel (LREM), qui compte 6 468 « followers », ou même de celui de Mathieu Cahn (PS), qui s’est récemment désisté, et qui en affiche 3 475.
Jeanne Barseghian joue de cette discrétion. « C’est vrai qu’elle a mené une campagne très posée, reconnaît Nicolas Tripa, engagé avec EELV à Strasbourg. Elle évite l’engagement frontal. »
Ses compétences comme argument de campagne
« Fédératrice », Jeanne Barseghian aime aussi se fondre dans le collectif. Sa campagne reste, en effet, peu marquante, malgré quelques tentatives amusantes. Comme cette photo la montrant grimée en Princesse Leïa, à l’occasion de la sortie du dernier Star Wars.
Son site officiel de campagne appuie fortement sur son CV de « première de la classe » : une jeune parisienne, qui a suivi des études de droit de l’environnement - en partie à Strasbourg - et qui a fait ses armes dans des associations de protection de la nature et des animaux, avant d’adhérer, en 2013, à Europe Écologie - Les Verts. Elle se dit « écologiste de toujours ».
La question des inégalités au coeur du programme
En 2014, soutenue par l’ancien candidat tête de liste Alain Jund (EELV), elle devient conseillère de l’Eurométropole, déléguée à l’économie sociale et solidaire et plus tard, à la réduction des déchets. Ses positions sont ouvertement à gauche, d’où une campagne centrée, entre autre, autour de la question des inégalités. « Strasbourg est une des villes les plus inégalitaires de France », a-t-elle souligné, dans une interview donnée à Pokaa.
La candidate voudrait ainsi créer 500 places d’hébergements en plus pour les personnes à la rue. Elle entend aussi jouer la carte de la démocratie participative : « Il ne suffit pas de décréter la participation citoyenne. Encore faut-il y mettre les moyens. »
Malgré tout, peu de propositions concrètes émergent de son programme. Par le passé, elle n’a pourtant pas hésité à s’affirmer, comme lorsqu’elle a tenu tête à Robert Herrmann sur la question du Grand contournement ouest, qu’elle considère comme un « échec ». Autre faiblesse : la présence d’Alain Jund, critiqué pour avoir donné son accord à plusieurs projets de construction par le passé, à la 8ème place de la liste menée par Mme Barseghian.
Le défi maintenant : « se montrer »
Quant à son succès, il tient peut-être moins à sa popularité personnelle qu’à celle de son parti, qui bénéficie d’un vent favorable depuis les élections européennes de mai 2019, où il avait obtenu 21 % des suffrages à Strasbourg. D’autant plus que la campagne strasbourgeoise se déroule en l’absence du maire sortant, Roland Ries (PS). Un contexte qui pourrait bénéficier à EELV à Strasbourg, tout comme dans d’autres villes françaises, dont Besançon et Rouen. Pour le moment, Grenoble est la seule ville de France avec un maire écologiste à sa tête.
Le plus dur commence peut-être pour l’écologiste engagée, qui doit finaliser sa feuille de route. « Il n’y aura pas de négociation avec La République En Marche ni avec ceux qui sont plus à droite. Pour le reste, tout est ouvert. » La campagne s’intensifie désormais et les débats et rencontres vont se multiplier dans les semaines à venir. « Le gros défi désormais c’est qu’elle se montre », estime Nicolas Tripa. L’équipe de la liste écologiste se prépare et se retrouvera dimanche 9 février pour échanger sur la stratégie de campagne de leur protégée, qui se prend à rêver.
Sarah Chopin et Jérôme Flury
C’est une candidate « surprise » qui s’est hissée en tête du dernier sondage Ifop pour les municipales de mars 2020 à Strasbourg. Âgée de 39 ans et arrivée sur le tard en politique, Jeanne Barseghian, tête de la liste « écolo et citoyenne », soutenue par le parti Europe Écologie-Les Verts, est encore peu connue du grand public.
Même les élus strasbourgeois semblent méconnaître celle qui est pourtant conseillère à l’Eurométropole depuis 2014. À 20 Minutes, l’un d’entre eux avoue : « on n’a rien à dire sur elle car on ne la connaît pas. » « C’est quelqu’un dont les compétences sont reconnues mais qui doit faire ses preuves en terme de leadership », ajoute un autre.
Discrète mais « fédératrice »
Des intentions de vote « très étonnantes », analyse le politologue Richard Kleinschmager, dans le quotidien. La candidate écologiste bénéficie pour l’instant de « l’aura de l’inconnue ». Pour preuve, les recherches internet associées à son nom comportent en majorités les mots « CV », « Linkedin » ou « Wikipedia » - même si elle n’a, pour l’instant... pas de page Wikipedia à son nom. À l’inverse, le nom des autres candidats est plus régulièrement associé à des termes comme « 2020 », « municipales » ou « programme ».
La candidate écologiste mène sa campagne sans faire de vague. Pourtant, les derniers sondages la placent en tête des intentions de votes au second tour du scrutin de mars à Strasbourg.
Toujours assis sur un banc à côté du Monoprix, il finit ses journées, enveloppé dans son sac de couchage entre les magasins du passage. Vêtements, chaussures, couvertures, bouquins… Ses amis et lui, ont aménagé le lieu. Une fois la nuit tombée, le coin leur appartient.
« La police me demande à chaque fois de rentrer chez moi, mais ce qu’ils ne comprennent pas, c’est que je suis déjà chez moi. » Hier encore, jeudi 6 février, et face aux plaintes des commerçants, la police leur a ordonné de quitter les lieux. « Je comprends parfaitement ces commerçants. Une fois bourrés, les nouveaux sont parfois agressifs. Mais ce n’est pas une raison pour s’attaquer à nous », explique J.C, 57 ans, camarade de Michel.
Une « famille » soudée dans des conditions difficiles
Les deux anciens militaires avaient l’habitude d’acheter leurs bières au Monoprix juste à côté, mais le personnel de l’établissement leur a interdit d’y accéder, « parce qu’on traîne ici, et qu’on offre à boire à tout le monde. Y compris aux nouveaux », ajoute J.C.
D’après eux, appeler le « 115 », numéro gratuit pour les personnes sans-abri, ne sert pas à grand chose puisque les places ne sont presque jamais disponibles. Des agents de sécurité ont été placés devant la Fnac pour éviter qu’un autre « campement » ne se réunisse là-bas. « Ca ne sert à rien de déplacer la merde d’un coin à un autre. Il faut la nettoyer, essayer de la changer », reprend l'un des anciens militaires.
« Les gens doivent savoir que nous aussi, nous sommes fatigués. Nous dormons sur du béton, on nous vole le peu d’affaires qu’on a, on pisse sur nos couvertures, notre santé se dégrade de plus en plus et on se fait maltraiter par tout le monde », réagit William*, 30 ans. Ce sans abri a rejoint la « famille » il y a presque sept ans.
Michel, ancien militaire, vit dans la rue depuis 30 ans. Vidéo Aïcha Debouza / Cuej