Après Saverne la semaine dernière, Mulhouse vient de signer la charte pour la promotion des langues régionales. La France ne l'a pas encore ratifiée, mais les deux communes déclinent la charte européenne au niveau local. L'alsacien sera encouragé principalement dans les écoles et les administrations. Strasbourg devrait suivre cet exemple prochainement.
Mer rede elsassisch (« nous parlons alsacien »), c'est ce que pourront afficher dès demain les guichets des administrations mulhousiennes. Le conseil municipal vient de voter la charte pour la promotion de la langue régionale. Mulhouse est la deuxième ville de la région à décliner la charte européenne après Saverne le 10 février. « Même si la France ne l'a pas encore ratifiée, les collectivités locales peuvent choisir et mettre en œuvre des engagements dans les domaines qui les concernent », explique Jean-Marie Woehrling, président de Culture et Bilinguisme. L'association propose aux communes une version adaptée de la charte européenne des langues régionales, épurée des éléments qui ne concernent que les Etats. Un projet que l'association expliquera aux élus et candidats aux municipales lors d'une réunion prévue le 28 février. Sans attendre, Mulhouse, à l'exemple de Saverne, a adopté la charte. Seuls deux élus FN ont voté contre, Patrick et Martine Binder.
Saverne, pionnière en la matière, a choisi 35 actions pour promouvoir la langue régionale parmi les engagements proposés par la charte européenne. Pour les plus concrets, la possibilité d'utiliser l'alsacien dans les accueils périscolaires et les écoles mais aussi dans les services administratifs de la commune. En formant, si besoin, les agents municipaux.
Au Centre culturel alsacien à Strasbourg, la bibliothèque propose des livres en alsaciens et sur l'histoire de la région. (Crédit photo : Gwladys Porracchia)
Si la charte concerne bien les langues régionales, en Alsace il faut toujours préciser de quoi on parle : dialecte alsacien ou allemand. Dans la charte, "par l'expression « langue régionale », on entend la langue allemande dans ses formes dialectales (dialectes alémaniques et franciques parlés en Alsace et en Moselle) et dans sa forme standard (Hochdeutsch)." Ainsi, différentes actions peuvent être mises en oeuvre par les communes, tant pour promouvoir l'alsacien (parlé dans les administrations par exemple) que l'allemand (enseigné dans les classes bilingues).
A Strasbourg, la charte n'est pas encore signée, mais un groupe de travail réfléchit aux modalités de sa mise en oeuvre. Le maire sortant Roland Ries affirme s'être « toujours battu pour la promotion de la culture et de la langue régionale ». Si des actions sont déjà mises en oeuvre comme l'affichage des noms de rue en français et en alsacien, la promotion culturelle ou encore l'utilisation de l'alsacien dans les administrations ou au conseil municipal, "la signature de la charte permettrait d'aller plus loin dans le développement des classes bilingues, une des clefs pour la recherche d'emploi dans la région", précise Roland Ries.
Emploi et bilinguisme, c'est aussi un point important pour Odile Uhlrich-Mallet, adjointe à l'éducation et à l'enseignement à Colmar : "Je suis plutôt pragmatique, chaque enfant qui se trouve dans une classe bilingue trouvera plus facilement un emploi. Nous avons huit écoles bilingues et un quart des enfants sont inscrits en maternelle bilingue". Mais pour l'élue haut-rhinoise, « la signature d'une charte c'est de la communication, on n'en a pas besoin pour développer le bilinguisme. Promouvoir l'alsacien sans favoriser les classes bilingues, comme cela se passe à Mulhouse, ça ne fait pas une région bilingue. » A Colmar, la charte des langues régionales ne sera pas à l'ordre du jour avant les élections municipales.
Gwladys Porracchia