C'est une première en France: un ver parasitaire, le gongylonémose, a été découvert chez l'homme par des parasitologues strasbourgeois. Une curiosité scientifique sans danger.
Bernard Pesson, parasitologue à la retraite, a identifié le premier cas connu en France de gongylonémose, l'infection par un parasite retrouvé habituellement chez l'animal. Photo David Métreau
Un Haut-Rhinois avait un ver sous sa peau : le gongylonéma. C'est le premier cas découvert chez l'homme en France. Cet agent d'entretien a eu peur quand il a senti le corps étranger sous sa lèvre inférieure. Il est aussitôt allé voir son médecin qui lui a fait des examens, mais n'a rien trouvé. Quelques semaines se sont ensuite écoulées.
Au mois de juillet, il a alors découvert un ver sous les muqueuses de sa lèvre inférieure. Le quadragénaire a pu extraire le parasite et a eu la présence d'esprit de le mettre dans un flacon avec de l'alcool. Le flacon a été emmené dans un laboratoire d'analyse à Rixhem, près de Mulhouse qui, ne connaissant pas le parasite, l'a transmis au laboratoire de parasitologie et de mycologie médicale de Strasbourg. Le ver laisse les biologistes perplexes.
C'est Bernard Pesson, pharmacien retraité du laboratoire de parasitologie et de mycologie médicale de Strasbourg qui identifie l'animal avec l'équipe de parasitologie : « Au mois de juin, j'ai lu une publication du center of desease control and prevention (CDC) d'Atlanta (Etats-Unis) sur un cas de gongylonémose. Quand on nous a présenté ce cas au mois d'août, ça a fait tilt».
Bernard Pesson a eu la confirmation de Hubert Ferté, spécialiste des vers (plus particulièrement des nématodes) qui travaille à Reims sur les parasites des bovins. Le spécialiste en a ensuite fait une publication en février 2013.
Le gongylonéma est extrêmement rare chez l'être humain : « Moins de 60 cas ont été recensés chez l'humain dans le monde depuis 1850 », explique le pharmacien retraité. Tandis que chez les animaux : « C'est un parasite qui est très présent chez les bovins, mais aussi chez les ours et les singes ».
Plusieurs explications sont possibles : il peut avoir ingéré par inadvertance un insecte portant la larve ou encore bu de l'eau dans laquelle l'insecte se serait trouvé.
Bernard Pesson tient à souligner qu'il n'y a aucun caractère épidémique : « Il s'agit juste d'une curiosité ». Et si le patient n'avait pas retiré le ver de sa lèvre ? «Le parasite serait mort au bout d'un moment », assure le parasitologue. « L'homme est un cul-de-sac pour beaucoup de parasites», conclut-il.
Les rares personnes concernées dans le monde disent toutes n'avoir aucun souvenir d'avoir ingéré un insecte.
Pour ce chercheur, le parasite est sans danger pour l'homme.
David Métreau
Les relations infestieuses entre hommes et animaux
Le cas de gongylonémose découvert à Strasbourg est un exemple de zoonose, une infection et infestation naturellement transmissible de l'animal à l'homme (et vis et versa). Il existe des zoonoses bactériennes (typhus, tétanos, salmonellose) virales (rage, fièvre jaune) ou parasitaires (toxoplasmose, distomatose).
La plupart des maladies émergentes sont des zoonoses, selon l'OMS. C'est le cas de la grippe aviaire, de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (vache folle) ou du coronavirus. En Alsace, l'échinococcose alvéolaire, une zoonose provoquée par un ver plat qui se développe notamment dans l'intestin du renard. Chez l'homme, la maladie peut être mortelle.
L'histoire des zoonoses reflète les relations Homme-Animal : domestication, habitudes alimentaires, mode d'élevage, habitation, etc.