Fixer des quotas d’élèves non-francophones par classe, voilà ce que propose la candidate LR pour garantir la qualité de l’enseignement des écoles publiques. Une mesure qui manque de précision et, pour le moment, de consistance.
Pour le moment, la proposition de Valérie Pécresse ne dit pas à combien d'élèves allophones les quotas seront limités. © Amanda Mills
Proposition discrète dans le programme de Valérie Pécresse, « inciter les établissements scolaires à limiter le nombre d’élèves non-francophones par classe ». Ce n’est certes pas une des mesures phares de Valérie Pécresse en matière d’éducation. Elle est même reléguée à la fin de ses propositions pour stopper l’immigration, entre la lutte contre le séparatisme et l’enseignement des valeurs de la République. Mais elle a de quoi interroger.
Qu’englobe le clan Pécresse derrière l’expression « élèves non-francophones » ? « C’est quelque chose que nous n’avons pas encore défini », reconnaît Irène Weiss, déléguée nationale des Jeunes Républicains. Dans le jargon de l’Éducation nationale, on utilise plutôt le terme « allophone » pour désigner ces élèves qui parlent une autre langue que le français. Un néologisme qui met en avant la richesse de l’autre langue (allo- est dérivé du latin alter-). « Parler de “non-francophone”, c’est souligner la lacune de ces élèves, qui se présenteraient à nos portes avec un manque à combler, alors que ça peut aussi être une force dans une classe », explique un professeur des écoles seine-et-marnais qui souhaite rester anonyme. À son arrivée sur le territoire, un enfant allophone est obligatoirement inscrit à l’école dans une classe « ordinaire » puisqu’en France, l’obligation scolaire s’applique de la même façon pour tous les élèves.
Une mesure pour qui, une mesure pour quoi ?
La déléguée des Jeunes Républicains ne sait pas dire à combien d’élèves sa candidate prévoit de poser la limite. « Nous ne sommes pas encore au pouvoir, nous attendons d’être force de proposition pour nous pencher sur les détails de cette mesure en consultant les équipes pédagogiques. » Un quota pour renforcer l’intégration des élèves allophones, oui, « mais surtout pour assurer la qualité des apprentissages, ajoute-t-elle. Une classe avec trop de non-francophones est une classe dont le niveau baisse, puisque les enseignants sacrifient du temps pour s’occuper individuellement de ces élèves. » Mais du coup, garantir les enseignements pour qui ? Pour les allophones et leurs conditions d’apprentissage du français, ou le reste de la classe qui pâtirait de leur présence ? « En limitant leur nombre, tous les enfants seront gagnants, les francophones comme les autres. »
N’existe t-il pas déjà un nombre limité d’élèves allophones par classe ? « Pas vraiment, confie Patrice Leguérinais, enseignant syndiqué au SNUipp-FSU du Val-de-Marne. Mais lorsqu’ils sont nombreux dans un même établissement, on les répartit intelligemment entre les classes ». Si l'établissement le propose, ils peuvent bénéficier d’une prise en charge renforcée, avec cours de français en petit groupe limité à une quinzaine d'élèves, grâce au dispositif d’accompagnement UPE2A (unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants). Sinon, une solution « de proximité » est proposée aux enfants pour qu'ils puissent recevoir des cours de français langue seconde ou de scolarisation. En 2021, les UPE2A ont remplacé les classes d’accueil et d’initiation pour non francophones — qui les regroupaient entre eux —, avec pour objectif de renforcer leur inclusion dans le système scolaire.
Camille Lowagie
Édité par Nils Sabin