C’est un mot d’ordre qui vient d'Emmanuel Macron : le « name and shame » consiste à désigner publiquement quelqu’un pour ses mauvais agissements. Cette pratique anglo-saxonne est plébiscitée par le gouvernement. Mais elle n’est pas sans limites.
Le gouvernement veut muscler son plan de lutte contre la fraude fiscale. Pour cela, outre la création d’une police fiscale, Edouard Philippe s’est dit prêt hier à user du « name and shame » (nommer et couvrir de honte).
« Il faut que le peuple français sache qui cherche à s’exonérer des obligations fiscales légitimes qui sont à la charge de chacun », explique le Premier ministre. Les fraudes les plus graves, probablement les peines et sanctions prononcées, vont être publiées.
Contre la fraude fiscale, nous voulons publier les peines et sanctions dans les cas les plus graves. Il faut que le peuple français sache qui cherche à s’exonérer de ses obligations fiscales. #DirectAN pic.twitter.com/wSDeebTgWc
— Edouard Philippe (@EPhilippePM) 31 janvier 2018
Le « name and shame » est une pratique anglo-saxonne appréciée par le président de la République. A Bercy, l’ex-ministre utilisait cette technique contre les retards de paiement des entreprises. Le programme d’Emmanuel Macron propose de publier les noms des entreprises qui contreviennent à l’égalité homme-femme en matière de salaire. La semaine dernière, le président de la République n'a pas exclu de nommer les entreprises qui ne respecteront pas les règles du projet de loi qui encadre la grande distribution.
Les enseignes de la distribution tremblent ? Emmanuel Macron menace la GMS du name and shame #négos2018 commerciales | Les Marchés https://t.co/dfRFGMP615 pic.twitter.com/sw8SOmmZb4
— Nathalie Marchand (@NathalieMarcha4) 26 janvier 2018
L’arbre qui cache la forêt
Outre-Manche, cette technique du « name and shame » est courante. Elle aurait pu conduire au pire en 2000, lorsqu’un journal à scandale diffuse dans ses pages une centaine de portraits de pédophiles. La suite : des manifestations devant les domiciles d’une vingtaine de pédophiles présumés, des vitres brisées, des véhicules incendiés. En 2009, un scandale des notes de frais avait éclaboussé trois députés et un Lord.
En France, le secrétariat d’Etat à l’égalité entre les femmes et les hommes a épinglé deux entreprises, en septembre 2017 : Sartorius Stedim Biotech et Maurel & Prom. Il leur était fait le reproche d’être en retard dans la féminisation des instances dirigeantes et le refus de se rendre à la formation organisée à ce sujet.
Si l’opération est spectaculaire, c’est bien l’arbre qui cache la forêt. Les discriminations persistent dans le monde du travail. 2 271 mises en demeure ont été prononcées en 2016, contre des entreprises qui n’ont pas trouvé un accord sur ce sujet. 116 sociétés ont payé des pénalités financières. La liste complète de ces entreprises fautives n’a jamais été publiée car cette révélation pourrait leur porter préjudice.
David HENRY
Photo: Pierre TRICOLET (Flickr)