Les enquêteurs anticorruption de la police judiciaire ont perquisitionné le 17 février le siège du Front national. En cause, le détournement de fonds européens pour payer les membres du parti.
Dans la foulée du parti Les Républicains, c'est maintenant au tour du Front national d'être visé par la justice. Le 17 février au matin, des policiers de l'office anticorruption de la police judiciaire ont perquisitionné le siège du parti à Nanterre. Les enquêteurs cherchent à savoir si le FN a rémunéré vingt cadres du parti par le biais des financements du Parlement européen, alloués à chaque groupe politique.
La veille, la police judiciaire avait mené d'autres perquisitions chez Jean-Marie Le Pen, désormais exclu du parti par sa fille Marine, et au bureau de son secrétaire général particulier, Gérald Gérin. C'est ce dernier qui est à l'origine de l'enquête sur des emplois fictifs présumés d'assistants parlementaires au Parlement européen. En même temps assistant de Jean-Marie Le Pen au FN en 2015 et assistant de l'eurodéputée Marie-Christine Arnautu, son cas avait alerté Martin Schulz, président du Parlement. Après quoi, celui-ci avait décidé de saisir l'Olaf, l'organisme antifraude de l'Union européenne, qui a ensuite transmis le dossier à la justice française.
Abus de confiance encouru
La base de cette enquête s'appuie sur la législation européenne, qui interdit de "financer des contrats établis avec des groupes politiques du Parlement ou des partis politiques" par le biais des deniers de l'instance européenne. S'il était avéré que les assistants parlementaires frontistes ont bel et bien travaillé pour le compte de leur parti en étant rémunérés grâce à ce détournement, le FN pourrait être condamné pour abus de confiance.
Au début de l'enquête, une note interne du Front national, adressée à ses cadres, définissait le statut de ses employés : "Certains sont des (...) salariés à plein temps du parti, d'autres sont à temps partiel, partageant leurs activités professionnelles entre le parti et le député qu'ils assistent (en particulier lorsque ce député occupe au sein du FN des fonctions exécutives), la plupart enfin sont des bénévoles."
"Une opération politique"
À la suite des perquisitions des 16 et 17 février, le Front national a réagi par un communiqué publié sur sa page Facebook. Le parti y dénonce "une opération politique directement pilotée par François Hollande et Manuel Valls, dans le but d'entraver, de surveiller et d'intimider l'opposition patriote". Face aux accusations d'emplois fictifs au Parlement de Strasbourg, le FN se défend en soutenant que "dans tous les partis, des assistants parlementaires ont des responsabilités politiques".
Jean-Marie Le Pen s'est dit quant à lui victime d'une "évidente persécution", tandis que Florian Philippot, vice-président du Front national, a lui aussi accusé indirectement le Parti socialiste d'être derrière cette procédure judiciaire.
Pour tout savoir de la stratégie d'un parti d'opposition, quel meilleur moyen que de perquisitionner son siège au motif d'une affaire bidon?
— Florian Philippot (@f_philippot) 17 février 2016
Actuellement, l'enquête en est au stade préliminaire. En fonction des éléments découverts par les enquêteurs, le procureur de la République peut choisir de classer l'affaire sans suite, soit demander à un magistrat instructeur de mener des investigations plus poussées ou convoquer les prévenus devant un tribunal correctionnel.
Benjamin Hourticq