Nouveau rebondissement dans l'affaire Bygmalion. L'ex-chef de l'Etat a été convoqué vendredi dernier par les enquêteurs, sous le régime de l'audition libre.
L'ancien président de la République Nicolas Sarkozy a été entendu vendredi 4 septembre par les policiers de l'office anti-corruption dans le cadre de l'enquête sur l'affaire Bygmalion, selon une information du Monde confirmée par une source proche de l'enquête. Le chef des Républicains a été convoqué sous le régime de l'audition libre, qui lui permettait de comparaitre librement et de quitter à tout moment les locaux de la police.
Cette audition intervient dans le cadre de l'enquête sur l'affaire des fausses factures de Bygmalion, du nom de cette société de communication, qui assurait la logistique des meetings de Nicolas Sarkozy lors de sa campagne électorale de 2012. Les enquêteurs estiment à 18,5 millions d'euros le montant des fausses factures émises par Event & Co, filiale de Bygmalion et imputées à l'UMP au titre d'événements plus ou moins fictifs - alors qu'il s'agissait de dépenses de meetings. Le but : éviter que les dépenses de campagne n'explosent le plafond autorisé de 22,5 millions d'euros et ne soient rejetées par le Conseil constitutionnel.
Mais en juillet 2013, les Sages avaient invalidé les comptes de campagne du candidat UMP, constatant un dépassement des plafonds de dépenses autorisés (23 millions d'euros au lieu des 22,5 millions maximums). Un chiffre bien loin du montant total réel, estimé à 41 millions d'euros, qui avait pourtant déjà provoqué à l'époque l'annulement du remboursement des frais de campagne.
Treize personnes inculpées
Au total, treize personnes ont été mises en examen dans ce dossier depuis l'automne dernier. Des dirigeants de Bygmalion, dont les fondateurs Bastien Millot et Guy Alvès, mais aussi des cadres de l'UMP dont l'ex-directeur général, Eric Cesari, et l'ancienne directrice financière, Fabienne Liadzé, ainsi que des responsables de la campagne, notamment son directeur, Guillaume Lambert, et son directeur adjoint, Jérôme Lavrilleux. Derniers en date : les deux experts-comptables du candidat Sarkozy, Pierre Godet et Marc Leblanc, qui avaient donné l'alerte sur son coût avant d'en valider les comptes. Ils avaient eux aussi été mis en examen début juillet.
L'ancien président de la République n'avait jusque-là jamais été entendu par les enquêteurs dans le cadre de cette affaire. Nicolas Sarkozy avait d'ailleurs affirmé n'avoir « appris le nom de Bygmalion [que] longtemps après la présidentielle ». Si aucune des treize personnes mises en examen dans ce dossier ne l'avaient impliqué, certains ont insisté sur le rôle central qu'il occupait dans la stratégie de sa propre campagne. A l'instar de son ancien directeur de campagne, Guillaume Lambert, qui avait affirmé aux enquêteurs que Nicolas Sarkozy était bel et bien au courant des contraintes budgétaires après avoir été alerté par l'un de ses experts-comptables. Des éléments qui ne démontrent pas que l'ancien président avait connaissance du système de fausses factures.
Mais l'enquête ouverte pour faux et usage de faux, abus de confiance et tentative d'escroquerie a été élargie, en novembre 2014, au financement illégal de campagne. Un délit qui vise expressément le candidat Nicolas Sarkozy s'il est avéré qu'il a sciemment dépassé le plafond des dépenses autorisées.
L'affaire Bygmalion, comme d'autres dossiers judiciaires dans lesquels son nom est cité, pourrait nuire à la possible candidature de Nicolas Sarkozy à la présidentielle de 2017.
Estelle Pattée