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Le Parlement met fin aux disparités d’achats en ligne


07 février 2018

Les eurodéputés ont approuvé mardi la fin du blocage et des disparités géographiques pour les clients de sites e-commerce dans l’Union européenne. D’ici neuf mois, les Européens auront un égal et plus large accès aux biens vendus en ligne.

Roza Thun et Andrus Ansip
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A une large majorité, le Parlement a voté la fin des disparités entre les Européens pour leurs achats en ligne. © Emilie Sizarols

En 2015, pour passer un week-end à Disneyland Paris, une famille française devait débourser en moyenne 865 euros, contre 1204 euros pour une famille roumaine ou 1339 euros pour une famille italienne. Si aujourd’hui l’entreprise a harmonisé ses prix sous la pression de la Commission, cette pratique de discrimination au sein de l’Union européenne reste monnaie courante.

 

Le Parlement européen a approuvé mardi à une large majorité (557 voix pour, 89 contre) la fin du blocage et de la discrimination géographiques : d’ici décembre, les sites de vente en ligne ne pourront plus différencier les prix, les conditions de paiement et les produits proposés selon le pays de résidence du consommateur. Les Etats conservent en revanche leurs propres règles fiscales, comme sur la TVA.

 

63% d’entreprises discriminantes

 

Certaines centrales de réservations d’hôtels proposent des prix différents en fonction du pays d’origine des touristes malgré des dates identiques. De même pour les agences de location de voiture. Selon une étude de la Commission européenne parue en 2016, 63% des entreprises discriminent les clients en ligne au sein de l’Union. La palme revient aux secteurs de l’électroménager (86%) ainsi que de l’électronique et des logiciels (79%).

 

Autre point phare du règlement adopté mardi : l’égal accès des biens au sein de l’Union. Les sites en ligne seront ainsi obligés de proposer la même interface à tous les internautes, quel que soit leur pays de résidence. Amazon ne pourra plus rediriger un consommateur français vers Amazon France sans l’avoir au préalable informé. « Avec le nouveau règlement, le consommateur peut dire ‘’Nous sommes dans un marché unique, j’ai le droit d’acheter ce produit !’’» se félicite Agustin Reyna, directeur pôle numérique au Bureau européen des unions de consommateurs.

 

Le dernier grand projet du règlement concerne la transparence des prix pratiqués lors de la livraison transfrontalière. « Nous respectons la liberté entrepreneuriale donc nous laissons le choix aux entreprises de décider qui fera la livraison. Mais elles ne pourront plus refuser d’emblée de vendre un produit », précise Andrus Ansip, vice-président de la Commission européenne chargé du marché numérique unique. Le vendeur ne peut donc refuser de vendre un produit sous prétexte qu’il ne peut pas le livrer.

 

Contenus culturels réévalués en 2020

 

Point épineux des débats, les contenus culturels soumis à droit d’auteur restent exclus du règlement. Le Parlement et les Etats sont finalement parvenus à un compromis en novembre en proposant une réévaluation d’ici deux ans. « Avec la Commission européenne, nous voulions inclure les jeux vidéo, les e-books et la musique, mais nous n’avons pas pu vaincre la résistance des Etats », a reconnu Róża Thun, eurodéputée polonaise (PPE, centre-droit), rapporteure du texte.

 

Les disparités sur le traitement des droits d’auteur entre les Etats empêchent, selon Virginie Rozière, eurodéputée française socialiste, une offre culturelle globale et équitable. « On sait qu’il est difficile pour le consommateur de ne pas avoir accès aux œuvres, ajoute-elle. Mais nous avons le devoir de protéger les auteurs et la nécessité de leur donner une rémunération correcte. » De fait, vendre les droits de diffusion d’une série télévisée à vingt-sept Etats apparaît plus rentable pour les créateurs qu’à un seul Etat.

 

Impossible en effet pour un Français d’avoir accès au catalogue britannique de Netflix, au Spotify italien ou encore aux livres numériques vendus en Allemagne. « On aurait pu faire beaucoup mieux : on a menti aux citoyens, on leur a fait croire qu’ils pourraient voir leurs films et écouter leur musique préférés », a déploré lors du débat Jasenko Selimovic, eurodéputé suédois libéral (ALDE).

 

Après la réévaluation fin 2020 des contenus soumis aux droits d’auteur, certains eurodéputés entendent aller encore plus loin. « Il n’y a plus de place pour le protectionnisme en Europe, a assuré Róża Thun. Le prochain pas : harmoniser la TVA en Europe et ouvrir le service des marchés de l’audiovisuel. »

 

Juliette Vilrobe et Camille Wong

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