L'association « Femmes d'Alsace » vient d'adresser une lettre ouverte à une cinquantaine d'élus de la région pour protester contre le non-respect de la parité dans le processus d'investiture aux élections législatives. En Alsace, elle est moins respectée qu'ailleurs en France par les principales formations politiques. L'UMP fait figure de mauvais élève. Le PS régresse.
Les 577 députés français seront élus lors des élections législatives du 10 au 17 juin 2012. Photo : Flickr/CC BY-NC-SA 2.0/Richard Ying)
De tractations en arrangements, les partis politiques font leur cuisine afin de désigner leurs candidats aux élections législatives de juin 2012. En plus d'être politique, le calcul est aussi financier puisque la loi du 6 juin 2000 sanctionne les partis qui ne respectent pas la parité au niveau national. L'UMP n'a investi que 28% de femmes sur l'ensemble des 577 circonscriptions, soit à peine 2% de plus que lors des élections législatives de 2007. Ce choix devrait coûter au parti de la majorité environ quatre millions d'euros de pénalité. Le PS, lui, annonce pour la première fois un respect de la parité. Il ne paiera donc pas d'amende. Mais, si au niveau national les progrès engagés sont réels, en Alsace, ils sont inexistants.
" Combien coûte une femme ? "
Dans une lettre adressée à une cinquantaine d'élus alsaciens, l'association «Femmes d'Alsace » – pour le respect de la parité dans les instances élues – s'indigne du sort réservé aux femmes politiques en Alsace. « Combien coûte une femme... pour un parti politique ? », demande Gisèle Bourcart, sa présidente, rappelant « qu'on préfère payer l'amende plutôt que faciliter leur présence ». « Les prochaines élections nous montrent combien il est difficile pour une femme d'obtenir une investiture dans une circonscription gagnable », continue la militante féministe.
En Alsace, les chiffres ne trompent pas. Comme en 2007, l'UMP y a investi trois femmes pour quinze candidats au total, soit 20% de femmes. C'est encore moins que les 28% affichés par le parti au niveau national. Et on ne peut pas dire que les candidates bénéficient des meilleures conditions de campagne. Nicole Thomas, dans la 9e circonscription du Bas-Rhin, a dû batailler dur pour empêcher le parachutage à sa place d'Eric Schahl, conseiller de Nicolas Sarkozy. Quant à Anne Hulné, cette femme politique est investie dans une circonscription perdue d'avance : la 1ère circonscription du Bas-Rhin, fief socialiste depuis 15 ans. La candidate n'a pourtant « pas du tout l'impression d'être défavorisée ». « On ne transforme pas la société par décret. Il y aura égalité quand les femmes auront les mêmes compétences que les hommes », estime-t-elle.
Les Alsaciens, plus "conservateurs"
Au PS aussi, les efforts affichés au niveau national ne sont pas visibles en Alsace. Question parité, le parti a même régressé par rapport aux dernières élections législatives. De neuf candidates pour seize circonscriptions* en 2007, il ne présente plus en 2012 que six candidates sur quinze circonscriptions. Pour Daniel Ehret, candidat EE-LV dans le Bas-Rhin, l'une des raisons à ce décrochage alsacien tient au contexte politique régional et à la mentalité plus «conservatrice» des Alsaciens. « La droite, majoritaire, montre le mauvais exemple », soutient-il. « D'ailleurs, l'Alsace est en retard par rapport à la moyenne nationale concernant la représentation des femmes en politique, cela se vérifie à tous les niveaux. » Sandra Regol, également candidate EE-LV dans le Bas-Rhin, le rejoint : « Dans les régions plus à gauche, le PS exerce sûrement une influence favorable alors qu'ici, la domination de l'UMP est un frein au changement ».
Chez les écologistes, la parité est appliquée aussi systématiquement que possible, « quitte à virer à l'absurdité », indique Daniel Ehret, dont la candidature a été évincée en 2007 au profit d'une femme. Aux législatives de 2007, les Verts ont présenté huit candidats hommes et huit candidates femmes. Cette année, EELV présentera quatre femmes et cinq hommes.
* Suite au redécoupage des circonscriptions législatives de 2012, le nombre de circonscriptions en Alsace est passé de 16 à 15.
anne-claire poirier