15 février 2012
Mercredi soir, les eurodéputés ont interrogé Viviane Reding, commissaire à la justice et aux droits fondamentaux, sur la protection des données personnelles des citoyens européens. La législation américaine a cristallisé les inquiétudes.
Quatre partis politiques du Parlement européen, les démocrates-chrétiens (PPE), les Verts/ALE, les libéraux démocrates (ALDE) et l'extrême-gauche (GUE/NGL) ont interpellé la Commission européenne sur la protection des données personnelles mercredi 15 février. Les lois américaines comme le Medicare act, FATCA, un projet de loi contre l'évasion fiscale, FISA et le Patriot Act (1) imposent la communication de données personnelles enregistrées en Europe aux autorités des Etats-Unis. Les eurodéputés ont cherché à savoir si cette législation a un impact sur les droits des citoyens et des entreprises européennes. Ils demandent à la Commission d'en améliorer la protection.
" Les Etats-Unis considèrent que leur juridiction s'appliquent aux activités et aux acteurs sur le sol américain et aussi dans le reste du monde. Avec cette interpétation, la loi américaine a des conséquences en Europe. Cependant, les données stockées dans l'UE doivent être couverte par la loi européenne. La commission le sait, alors que fait-elle pour protéger les entreprises face à ces confrontations juridiques ? interroge vivement Sophia In't Veld, eurodéputée néerlandaise (ALDE) et vice-présidente de la commission des libertés civiles, qui s'oppose aussi à l'accord UE-Etats-Unis sur le transfert de données des passagers aériens. FATCA par exemple suscite des inquiétudes très fortes des banques européennes et des assureurs."
Echange de vues entre Sophia In't Veld (à gauche), eurodéputée néerlandaise (ADLE) et vice-présidente de la commission libertés civiles et Viviane Reding (à droite), vice-présidente de la Commission européenne et commissaire à la justice et aux droits fondamentaux.
Une réforme globale de la protection des données en cours
Viviane Reding, vice-présidente de la Commission européenne et commissaire à la justice et aux droits fondamentaux a soutenu que le transfert de données doit toujours, dans l'idéal, être soumis à la législation européenne. Mais, elle a reconnu que cette question n'était pas explicitement abordée dans le cadre juridique actuel. " C'est pourquoi la Commission a mis ce problème sur la table le 25 janvier pour essayer de fournir des clarifications légales supplémentaires", a-t-elle rappelé. La Commission a en effet proposé une réforme globale des règles adoptées par l’UE en 1995 en matière de protection des données, afin de renforcer le droit au respect de la vie privée dans l’environnement en ligne.
" Pour qu'il y ait transmission de données, il faut une raison d'intérêt général, a poursuivi Viviane Redding. Et celle-ci doit être reconnue par le droit communautaire ou par celui d'un État membre. Cela peut donc inclure, par exemple, un transfert de données entre les autorités de la concurrence, les adminstrations fiscales et douanières et pour les enquêtes et l'arrestation de criminels. Pour le moment, les négociations sont toujours en cours, a-t-elle admis. Et nous n'avons pas encore de conclusions." Le 6 février, les Etats-Unis ont annoncé que FATCA n'impliquera un transfert de données qu'entre les seules administrations fiscales, sans imposer aux intermédiaires financiers de l'UE de participer. " C'est une bonne nouvelle, assure Viviane Reding, c'est dans cette direction que nous voulons aller, en respectant la Charte des droits fondamentaux de l'Union."
Emilie Jéhanno
(1) Le Medicare act préoccupe au sujet du transfert de données médicales et de données des assurances. Le FATCA (Foreign account tax compliance act) veut lutter contre l'évasion fiscale. Son entrée en vigueur est prévue au 1er janvier 2013. Concrètement, si un citoyen européen a un lien avec les Etats-Unis, l'administration fiscale américaine pourrait demander d'accéder à ses comptes européens afin que celui-ci paye des impôts aux USA. Dans la lutte contre le terrorisme, FISA (Foreign intelligence surveillance act) et le Patriot act sont deux outils permettant aux autorités américaines de surveiller les communications, dont internet, avec des pouvoirs étendus.