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Face à Bruxelles, Strasbourg soutient son médiateur


14 mars 2013

 

L'extension contestée de l'aéroport de Vienne, en Autriche, fait l'objet d'un bras de fer entre la Commission et le Médiateur européen. Strasbourg  soutient son champion.

Le Médiateur européen Nikiforos Diamandouros a annoncé, jeudi 14 mars, son intention de prendre sa retraite le 1er octobre 2013, après dix ans d'exercice. Crédit photo: European Parliament 

Le Parlement jette son poids dans la balance sur le contentieux à rebondissements qui oppose le Médiateur européen à la Commission, au sujet de l'extension de l'aéroport de Vienne, en Autriche. En adoptant le rapport spécial (voir ci-contre) de Nikiforos Diamandouros, il fait sienne les conclusions de mauvaise administration adressées de la Commission dans la gestion de ce dossier. Il lui demande de reconsidérer un conflit d'intérêt qu'elle a négligé et de s'assurer que les plaignants puissent former un recours devant la justice.

Initié en 2006, par 27 organisations de la société civile, le litige porte sur l'agrandissement de l'aéroport de Vienne, entrepris dès 1999. Les plaignants invoquent alors une infraction des autorités autrichiennes au droit communautaire: avant de débuter les travaux, celles-ci n'ont pas procédé à l'étude d'impacts environnementaux (EIE), requise par une directive de 1985.

Directement saisie, la Commission décide, d'un commun accord avec les autorités autrichiennes, qu'une EIE a posteriori doit être élaborée. Mais en 2008 les plaignants reviennent à la charge. Ils critiquent la manière dont cette EIE de substitution a été effectuée. Ils se tournent vers le Médiateur pour mettre en cause la négligence de la Commission dans son contrôle. Ils mettent notamment en avant un possible conflit d'intérêt: l'autorité chargée de mener la nouvelle EIE est celle là même qui avait délivré les permis pour les travaux concernés.

En réponse à la requête du Médiateur, la Commission lance une procédure d'infraction contre les autorités autrichiennes, et lui déclare qu'elle ne la clôturera que lorsqu'elle sera convaincue que les mesures nécessaires ont été prises. S'estimant satisfait, le Médiateur clôt son enquête en décembre 2009.

 

Transmettre le litige au Parlement européen

Mais en novembre 2010, nouvelle plainte,  portant maintenant sur la conduite de la procédure d'infraction. La Commission l'ignore. Le Médiateur ouvre une deuxième enquête. Il conclut finalement à une mauvaise administration de cette procédure par les services de la Commission:  rien n'indique qu'elle ait correspondu avec les autorités autrichiennes pendant la période où l'EIE devait être réalisée, le conflit d''intérêt n'a pas été examiné, et les droits des plaignants n'ont pas été respéctés. Le Médiateur transmet en conséquence à la Commission une recommandation lui enjoignant de reconsidérer sa position. Cette recommandation est restée sans suite.

Ne disposant d'aucun autre pouvoir de coercition, le Médiateur a décidé de transmettre ce contentieux au Parlement sous la forme d'un rapport spécial. Ce rapport, adopté mardi 12 mars par le Parlement, donne une visibilité publique à un manquement de la Commission et un surcroît de poids politique à la requête de son auteur.

"On est prêt à écouter les citoyens et le Médiateur"

En l'adoptant, le Parlement espère inciter la Commission à exécuter ces recommandations et se félicite d'impliquer les citoyens « qui ont le droit de participer aux décisions », a affirmé le rapporteur Margrete Auken, (Verts/AlLE). « Il faut envoyer un signal clair pour montrer qu'on est prêt à écouter les citoyens et le Médiateur », a-t-elle conclu.

Olivia Schmoll

L'arme du rapport spécial

Institué en 1992, par le traité de Maastricht, le Médiateur est élu par le Parlement. Siègeant à Strasbourg, il reçoit et examine les plaintes et mène le cas échéant des enquêtes sur des cas allégués de mauvaise administration dans l'action des institutions européennes. Il dispose principalement de pouvoirs d'enquête pour tenter de régler à l'amiable un litige entre une institution et ses administrés. Ses recommandations n'ont pas de pouvoir contraignant.

En dernier recours, il peut, lorsqu'il n'a pas pu obtenir satisfaction, soumettre un rapport spécial au vote du Parlement.  Le procédé est rarement utilisé: en moyenne une fois par an. Il lui permet d'attirer l'attention de l'opinon sur un cas tout en rendant public son désaccord avec l'administration concernée. L'autorité supplémentaire conférée par l'adoption de ce rapport par le Parlement permet généralement le règlement du contentieux.

o.s

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