16 février 2012
Le Parlement européen monte au front. "Le temps est venu pour l'Europe d'être ambitieuse" a déclaré mercredi Joseph Daul, président du groupe PPE lors d'un débat sur la préparation du Conseil européen des 1 et 2 mars. Les députés réclament des mesures d'envergure pour la croissance. Ils ont inscrit leurs revendications dans deux résolutions sur l'Examen annuel de la croissance (EAC), dont une portant spécifiquement sur l'emploi.
"Il était une fois 2020, un joli conte" ironise le Vert Daniel Cohn Bendit en réponse au vice-président de la Commission Šefčovič Maroš qui évoque la stratégie 2020 dans son discours. C'est une des critiques principales du rapport de Marija Cornelissen. Sa résolution regrette « qu'une seule des cinq actions prioritaires recommandées au titre de l'Examen Annuel de Croissance aborde l'emploi et les aspects sociaux ».
Les parlementaires exhortent la Commission à contrôler l'exécution des mesures annoncées par les Etats membres dans le respect des lignes directrices pour l'emploi. "Les Etats membres doivent mettre en œuvre les réformes structurelles pour lesquelles ils se sont engagés", a déclaré Jean-Paul Gauzès (PPE,France) rapporteur sur l'examen annuel de la croissance, dont la résolution, qui soutient le renforcement de la gouvernance économique, approuve les priorités.
Lutter contre le chômage
La française Pervenche Béres (S&D), rapporteur sur les lignes directrices pour l'emploi souhaite " arriver à un équilibre entre les objectifs de la stratégie EU2020 et le pacte de croissance et de stabilité." Selon elle, certains Etats mettent trop l'accent sur le deuxième aspect, se concentrant sur des mesures d'austérité. Elle souligne même qu'en temps de crise, il faut « parfois tordre le cou au pacte de stabilité ».
En votant la résolution sur l'emploi, le Parlement européen demande au Conseil de s'assurer que les mesures d'assainissement budgétaire n'aient pas pour effet d'augmenter la pauvreté ou de freiner les efforts visant à lutter contre le chômage et en particulier le chômage des jeunes. Pour trouver des financements afin de répondre à la crise, il invite le Conseil européen à créer une taxe sur les transactions financières.
Prochaine étape lorsque le Conseil européen présentera ses orientations stratégiques les 1 et 2 mars prochain. Reste à savoir si il prendra en compte les priorités du Parlement. Il n'y est pas obligé.
Charlotte Stiévenard
Les rapporteurs Marija Cornelissen (Les Verts / ALE), Jean-Paul Gauzès (PPE) et Pervenche Béres (S&D).
« Plus de démocratie ! » c'est le message porté par les trois rapporteurs Jean-Paul Gauzès (PPE), Pervenche Berès (S&D) et Marije Cornelissen (les verts/ALE) lors du débat sur l'examen annuel de la croissance 2012 (EAC) en session plénière. Ils ont à cette occasion présenté leurs trois rapports sur cet examen, tous adoptés par le parlement à l'issue du débat.
Officiellement ces rapports n'ont aucune portée contraignante. Ni la Comisssion, ni le Conseil ne sont obligés d’en tenir compte puisque l'EAC n'est pas régi par une procédure législative. Cependant le parlement européen n'entend pas être ignoré. Il a un avis, qu'il exprime, et qui sera aussi soutenu par son président Martin Schulz à l'ouverture du Conseil europén du 1er mars. Les députés espèrent une réponse publique et précise des chefs de gouvernement au texte voté aujourd'hui.
En attendant les trois rapporteurs déplorent le déni démocratique du Conseil européen lorsque ce dernier ne consulte pas le Parlement européen, représentant des citoyens européens, pour fixer les politiques déterminantes notamment en matière d'économie, comme ce fut le cas pour le pacte Europlus adopté le 24 mars 2011.
Les doléances du parlement
Les députés refusent donc d'être de nouveau évincé de la direction du semestre européen et ont, durant le débat, exhorté le Conseil et la Commission européenne à recourir au « dialogue économique » prévu par le Sixpack. Cette procédure l'autorise à proposer aux États membres objet des recommandations de participer « à un échange de vue » avec lui et d'inviter des experts et les présidents des différentes institutions afin d'évaluer la situation économique et d'examiner les orientations décidées.
Les députés réclament de la Commission qu'elle fournisse une évaluation détaillée de la mise en œuvre, par les États membres, des recommandations qui leurs sont adressées.
Dans un entretien accordé à CUEJ-info J.P. Gauzès a en outre déclaré que le Parlement souhaite pour l’année prochaine l'élaboration d'une forme de codécision spéciale au semestre européen, adaptée à l'urgence de ces décisions annuelles. Conscient du temps que nécessite la discussion d'un texte au parlement il a assuré qu'il ne s'agirait pas de débattre de chaque recommandation pour chaque pays, mais d'affirmer l'importance du Parlement dans la définition des grandes orientations européennes.
Enfin les rapporteurs ont rappelé la nécessité d'appliquer les décisions prises conjointement comme dans le cadre de la stratégie Euro2020 et a demandé que le parlement puisse faire des propositions prises en compte par la Commission.
La présidente du Conseil ECOFIN Vestager Margrethe, également présente dans l’hémicycle a assuré prendre note des rapports présentés et s’est engagée à évoquer ces demandes lors du prochain Conseil le 21.02.2012 qui arrêtera un projet d' orientations économiques. Les députés ont promis d'y veiller.
Sandra Chamiot-Poncet
C'est avec l' Examen annuel de croissance, présenté par la Commission européenne le 23 novembre dernier, qu'a débuté le semestre européen. Ce document insiste notamment sur la nécessité de remettre l'Europe sur les rails en soutenant la croissance et l'emploi, face à une situation économique et sociale défavorable.
Contrairement à ce que pourrait laisser penser son nom, l'Examen annuel de croissance n'est pas seulement un bilan. C'est un ensemble de recommandations sur la politique économique de l'UE pour l'année à venir. Lors du Conseil européen de printemps, les chefs d'Etats se basent sur cet examen pour définir les orientations stratégiques applicablesaux politiques à suivre par les États membres. Ces derniers doivent présenter en avril leurs programmes nationaux de réforme et leurs programmes de stabilité à la Commission. Celle-ci examine, et formule des recommandations par pays, qui sont adoptées en juin par le Conseil européen. Le projet de budget soumis à chaque parlement national devra les prendre en compte.
Formellement les parlements ne sont pas associés à la chaîne des décisions qui trame ce calendrier.
Les 27 et 28 février prochain, à Bruxelles, les représentants des parlements nationaux et du Parlement européen se réuniront pour parler de leur rôle dans la coordination des politiques économiques de l'UE.
Selon une source proche de Pervenche Berès, "le Parlement européen n'y garde qu'un rôle de discussion". Les parlements nationaux de leur côté entendent se voir reconnaître leur place prépondérante dans les choix budgétaires, malgré le renforcement du pouvoir d'encadrement exercé au niveau européen.
Une deuxième tentative de la part du Parlement européen
Organisée pour la deuxième fois à l'initiative du Parlement européen, cette réunion interparlementaire a vocation de leur permettre de s'exprimer avant la réunion du Conseil européen de printemps les 1er et 2 mars, et de donner symboliquement leur avis sur les orientations économiques qui y seront arrêtées. "C'est une manière de devancer le Conseil européen et de s'inviter dans le jeu" concède la même source. Herman Van Rompuy, président du Conseil européen, ainsi que José Manuel Barroso, président de la Commission européenne s'y exprimeront informellement.
Trois commissions du Parlement européen y seront représentées : Affaires économiques et monétaires , Emploi et Affaires sociales et Budget. Les parlements nationaux choisiront chacun leur modalités de représentantion. Côté français, seule la présence d'Yves Bur, député alsacien, membre de la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale est à ce jour annoncée. "Les députés sont occupés à travailler sur le projet de loi de finances rectificatives" assure-t-on à l'Assemblée nationale. Autrement dit, ils ont des choses beaucoup plus sérieuses à faire.
En réalité, les parlements nationaux peinent à trouver leurs marques dans cet exercice de partage de la souveraineté budgétaire.
Yolène Thorez