14 février 2012
"L'Union européenne compte 23 millions de PME et 23 millions de chômeurs. Si chaque PME pouvait employer un travailleur en plus, le problème du chômage en Europe serait déminé." Johannes Hahn, commissaire européen à la politique régionale, a défendu, hier soir, la proposition de la Commission européenne, devant les eurodéputés, à l'occasion des traditionnelles questions à la Commission.
Lors du Conseil européen informel du 30 janvier dernier, José Manuel Barroso a proposé que les Etats membres réorientent les crédits qui doivent encore être affectés dans le cadre des Fonds structurels de l'Union européenne afin de soutenir les PME et de combattre le chômage des jeunes. Au total : 82 milliards d'euros, 60 provenant du FEDER et 22 du FSE. Si sur le fond, chacun salue cette initiative, sur la forme et sur la cohérence d'une telle mesure, les avis divergent.
Au PPE comme chez les libéraux, la proposition reçoit un accueil favorable malgrè des inquiètudes quant à ses conséquences. Les fonds en questions "ont déjà été répartis entre les Etats et affectés à des programmes et à des priorités", a déclaré Danuta Hübner (PPE/Pologne), présidente de la commission développement régional. Dans ces conditions, un redéploiement des fonds créerait une réelle incertitude : des régions initialement bénéficiaires pourraient craindre d'être pénalisées. Des clarifications s'imposent.
Danuta Hübner a été commissaire européenne à la politique régionale de 2004 à 2009 (CUEJ/Charlotte Stiévenard)
Autre préoccupation : peut-on agir de façon rapide et souple ? Les états connaissent des difficultés d'absorption des fonds : ils ne parviennent pas à les utiliser efficacement du fait de structures administratives inadéquates et de l'absence de procédure de suivi et de contrôle. Les PME, responsables de 85% des créations d'emplois entre 2003 et 2010, trouvent les procédures européennes complexes et peu claires. "Il faut un régime fléxible qui ne soit pas surchargé par la bureaucratie", soutient le député irlandais Jim Higgins (PPE).
Pour les socio-démocrates, le projet part d'un "bon sentiment" mais témoigne de l'incohérence de l'action européenne. Pervenche Berès (S&D/France) dénonce une contradiction au sein de la Commission : "on utilise les fonds structurels pour compenser la règle d'or mais aussi pour sanctionner les états membres". Le portugais João Ferreira (GUE/GNL) parle d'une proposition hypocrite visant à cacher les décisions désastreuses du dernier conseil européen.
Plus de 20% de jeunes chômeurs en Europe, une génération formée et pourtant sans emploi. Pour Maria Irigoyen Pérez (S&D/Allemagne), la priorité c'est "d'adapter la formation aux exigences du monde du travail", en incitant par exemple à la mobilité. Au sein du groupe des Verts/ALE, on insiste sur la nécessité d'une économie verte : "Nous avons besoin de projets durables dont profiteront les générations futures", a déclaré la député allemande Elisabeth Schroedter (Verts/ALE).
Les Etats membres doivent désormais s'entretenir avec la Commission en vue d'une éventuelle reprogrammation des fonds qui leur sont alloués. Parallèlement, la Commission a dépêché des équipes dans les huit pays qui connaissent le plus fort taux de chômage des jeunes. Elles lui feront un rapport en mars.
Lucie Marnas