Une affaire d’agression sexuelle aggravée sur une jeune femme placée sous curatelle renforcée était jugée mercredi à Strasbourg. Reconnu coupable, l'inculpé écope de 9 mois de prison avec sursis.
Photo d'illustration © P-A Lefort
Un géant quadragénaire de deux mètres, d’origine soudanaise, flanqué d’un traducteur, s’avance à la barre. Les faits qui lui sont reprochés sont graves. Il aurait attouché sexuellement et par surprise une personne vulnérable, le 9 mai, à l’hôpital civil de Strasbourg. Ces atteintes sexuelles sur la jeune femme de 23 ans, hospitalisée et placée sous curatelle renforcée, auraient eu lieu à deux reprises: dans l’ascenseur puis dans la chambre de la patiente en service d’urologie, voisine de celle d'un ami du prévenu à qui il rendait visite.
L’homme rencontre la victime dans le couloir, qui descend fumer une cigarette. Cette dernière lui propose de le suivre. Malgré sa totale incompréhension du français, étant arrivé il y a peu dans le pays, il comprend l’invitation et accompagne la victime. A leur remontée, il aurait tenté d’embrasser la jeune femme dans l’ascenseur en lui touchant la poitrine sans son consentement.
« C'est elle qui voulait un massage »
Plus tard dans l’après-midi, le prévenu rend à nouveau visite à sa victime, dans sa chambre, la 330. Il s’assoit sur le lit de la patiente et lui aurait touché la cuisse et le vagin. « Je ne lui ai pas touché la cuisse, mais je l’ai repoussée pour pouvoir m’asseoir sur le lit. C’est elle qui voulait un massage, car elle avait mal à l’épaule », relate le traducteur. « Vous avez des compétences en kinésithérapie ? Ils n’en manque pas dans l’hôpital si besoin. Savez-vous monsieur que l’on n’entre pas dans la chambre de personnes que l’on ne connaît pas! Ça se fait au Soudan? », rétorque autoritairement le président Pauly, socieux d'imposer une ambiance formelle. Le quadragénaire nie les faits reprochés. Il reconnaît sa présence dans l’ascenseur et dans la chambre, mais pas le reste.
L’atmosphère est pesante dans la salle d'audience bondée. La victime pleure, assise à côté de sa curatrice, à seulement un mètre derrière l'accusé. Très éloignée des premières déclarations faites à la police, sa version des faits ne joue pas en sa faveur. Son profil psychologique non plus. L’expertise psychiatrique révéle en effet un "homme intelligent, manipulateur, qui a une conscience relative des faits" qui lui sont reprochés et qui est "méprisant envers les femmes". Le profil de l’agresseur sexuel se dessine, mais le prévenu continue de nier : « Il doit y avoir des caméras à l’hôpital, regardez les ! Moi je n’ai rien fait ». « Quel intérêt aurait la victime de vous accuser ? », demande le président. D’intérêt, aucun, mais la victime en pleurs, installée au premier rang avec ses béquilles, semble fragile.
« Un passé psychologique assez lourd »
Placée sous curatelle renforcée, le plus haut degré de protection judiciaire, elle a un profil psychologique atypique. A aucun moment elle ne prend la parole durant l’audience. L’avocate de la défense ne manque pas de le relever. « Le comportement de la victime est ambivalent . Elle a un passé psychologique assez lourd puisqu’elle se dit victime de quatre viols et de deux agressions sexuelles ces cinq dernières années, toutes classées sans suite ». « La dernière procédure pour agression sexuelle date de 2013, classée faute d’éléments », valide le président Pauly. « Le profil de la victime n’explique pas le comportement de mon client, mais il doit atténuer la sanction », plaide l’avocate de la défense. Des demandes entendues par la cour qui condamne le prévenu à 9 mois de prison avec sursis sur les 12 requis par le procureur. Il doit également verser 2.000 euros au titre du préjudice moral et 500 euros pour les frais d’avocat de la victime. Son nom est désormais inscrit au Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles (Fijes). Une première mention pour l'homme dont le casier judiciaire était vierge.