Première femme à la tête de l’exécutif européen. L’allemande de 61 ans a dévoilé la composition de la nouvelle commission européenne. Portrait d’une europhile convaincue et déterminée.
Ursula Von der Leyen a été nommée par les chefs d'États de l'Union européenne le 2 juillet 2019./ Photo CC BY 2.0 European Parliament
« Aujourd’hui je suis ravie de vous présenter ma commission équilibrée, agile et moderne, dirigée avec détermination clairement centrée sur les réponses à apporter aux problèmes existants ». a tweeté Von der Leyen quelques minutes après avoir annoncé les noms des 26 commissaires qui l’accompagneront pendant les cinq prochaines années. 14 hommes et 12 femmes s’approchant ainsi d’une parité presque parfaite. Confirmée à la tête de la commission européenne deux mois auparavant, Ursula von der Leyen est encore loin de faire l’unanimité. Martin Schulz, ancien président du parlement européen s’était étonné de ce choix la qualifiant de « ministre la plus faible » du gouvernement allemand. En disgrâce outre-Rhin, cette nomination tombe à pic pour la sexagénaire qui a profité du rejet de la candidature de Manfred Weber par Emmanuel Macron. L’ancien patron du SPD (parti socialiste) Sigmar Gabriel avait lui aussi vivement critiqué cette décision, dénonçant « un acte de tricherie ».
L’Europe dans les gênes
« J’ai pensé à mon père », confie Ursula Von der Leyen à la presse à la sortie de l’hémicycle le 16 juillet. Elle venait d’être élue à la tête de la Commission européenne par les députés. Glanant 383 voix, à peine plus que les 374 nécessaires pour obtenir la majorité. L’Europe est une affaire de famille chez les Von Der Leyen. Son père a également fait une carrière européenne au poste de chef de cabinet du commissaire à la concurrence de la CEE entre 1958 et 1969. « Pour moi c’est comme revenir à la maison », déclare celle que ses parents surnomment Ursula « Roscher », petite rose, en raison de son teint pale, sa taille menue et de ses manières délicates. En effet, née en 1958 à Ixelles, un quartier de Bruxelles, elle a vécu en Belgique jusque ses treize ans.
Famille et patrie
Gynécologue de formation et mère de sept enfants, celle qui a succédé à Jean-Claude Juncker a, depuis ses premiers pas en politique, toujours milité pour le droit à concilier vie familiale et carrière professionnelle. Nommée en 2003 ministre des Affaires sociales, des femmes, de la famille et de la santé de Basse-Saxe, elle s’engage dans la lutte contre les discriminations envers les femmes au foyer. N’hésitant pas à multilier les messages féministes et à se mettre en scène en une des magazines. Promue ministre fédérale de la famille en 2005 puis du travail, la néo-présidente de la Commission européenne est à l’origine de la loi instaurant un salaire parental ou encore la création de 500 000 places de crèche. Des mesures encourageant les femmes à avoir des enfants sans pour autant sacrifier leur vie professionnelle. Mais qui ne feront pas l’unanimité au sein de son propre parti, la CDU.
Proche de Merkel
Comme son père avant elle, c’est en 1990 qu’elle rejoint la formation politique conservatrice. Alors élue dans locale dans la région de Hanovre, elle est repérée par Angela Merkel en qui fait sa protégée. La chancelière allemande n’hésite pas à lui confier le ministère de la famille dans son premier gouvernement et ira jusqu'à lui donner en 2013 les clés de celui de la défense. Là encore, une première pour une femme. Pourtant réélue à ce poste il y’a un an, ce dernier mandat fut davantage mitigé pour « Rosie ». La presse nationale allemande, ainsi que ses adversaires politiques lui ont notamment reproché la vétusté du matériel de l’armée et le déploiement de troupes supplémentaires au Mali. Cependant elle a surtout été attaquée pour avoir accusé l’armée de complaisance après l’arrestation d’un soldat aux penchants néonazis qui préparait un attentat.
Visée par une enquête parlementaire dans une affaire de favoritisme portant sur l’attribution d’un contrat de consultant, Ursula von der Leyen est, selon un baromètre Spiegel paru en mai, l’une des ministres les plus impopulaires en Allemagne. Heureusement, la conservatrice modérée a toujours pu compter sur le soutien sans faille d’Angela Merkel et a longtemps fait figure de chancelière potentielle. Néanmoins son bilan très controversé au ministère de la Défense a entravé son ascension.
Robin Magnier