Le 30 décembre prochain, l’enseigne de luxe fermera définitivement ses portes. Retraite, reconversion ou recherche d’emploi : pour les 150 salariés, il faut planifier l’après.
Le rose flashy des affiches estampillés d’un immense « Liquidation exceptionnelle » détonne avec les visages assombris des employés du Printemps. Les 150 salariés de l’enseigne de luxe et de beauté vivent leurs derniers mois au sein de l’établissement. « Ça me fend le cœur, j’ai passé de si belles années ici », souffle, déjà nostalgique, Christine*, 60 ans. Le 30 décembre, le Printemps implanté place de l’Homme de fer fermera définitivement ses portes après plus de 40 ans d’activité.
Un plan de licenciement qui n'épargne pas les plus âgés
Alors que des centaines de clients jouent des coudes pour dénicher les dernières bonnes affaires, les employés doivent eux penser à l’après. Le plan de sauvegarde de l’emploi a été signé en avril, quelques mois après que la direction nationale a annoncé la fermeture de l’enseigne. Le groupe a d’ailleurs refusé les dispositifs de pré-retraites, renvoyant ainsi les seniors sur le marché du travail.
Encore loin de la retraite, Nathalie*, 50 ans, a décidé d’entamer une reconversion. Dans quelques mois, elle commencera un CAP petite enfance entièrement financé par l’entreprise. Un changement de vie qui lui trottait dans la tête depuis plusieurs années: « Je n’avais jamais réussi à sauter le pas, je suis longtemps restée dans mon confort avec ce boulot où j’étais en CDI. Ce licenciement m’a permis de me donner un coup de pied aux fesses et d’enfin poursuivre ce projet, c’est un mal pour un bien finalement ». Même si la future ex-vendeuse languit de son nouveau projet, le retour sur le marché de l’emploi entre CV, lettre de motivation, entretien d’embauche, n’aura rien d’évident après 22 ans de stabilité.
Des projets de reconversion divers pour les ex-Printemps
Un étage plus bas, Lucie*, elle, ne passera pas par la case candidature. Elle a décidé de monter sa propre entreprise : « On va ouvrir une épicerie fine à Strasbourg en décembre, avec d’autres membres de ma famille », assure la jeune femme tout en rangeant les derniers pantalons de costume sur des cintres.
Si la fermeture est bel et bien prévue fin décembre, les rayons se vident très rapidement. « Je n’ai pas encore postulé, mais il faudrait que je m’y mette », s’inquiète Jérôme, 25 ans. Après seulement une semaine de liquidation, la moitié des produits pour homme ont été vendus. Le 3ème étage n’est plus accessible, rideaux de fer tirés. Difficile de croire que le magasin aura encore des choses à vendre d’ici quelques semaines. Jérôme a débuté en tant qu’apprenti l’année dernière et l’entreprise lui avait promis un CDI. Malgré cette déception, le jeune homme garde son objectif en tête : « Mon projet est de travailler dans le monde du textile haut de gamme, donc je pense que je vais aller chez la concurrence (aux Galeries Lafayette). Il faut surtout que je pense à mon CV pour rentrer dans le luxe plus tard ».
Une erreur stratégique pour les uns, une histoire de contexte pour les autres
Le virage vers le « luxe » entrepris en 2011, c’est d’ailleurs ce qui aurait fait couler l’établissement strasbourgeois selon les syndicats : « On nous a dit qu'il valait mieux vendre un sac à 3.000 plutôt que dix sacs à 300 euros. Sauf que du coup on n'avait plus de clients, ce qui n'attirait personne non plus », dénonce dans un article de France 3 Grand Est Yolande Fischbach, déléguée CGT Printemps Strasbourg.
La direction nationale de Printemps justifie la fermeture de l’établissement strasbourgeois par des raisons économiques compliquées, notamment à cause de la pandémie et de la crise des Gilets Jaunes. Trois autres magasins en France s’apprêtent également à baisser le rideau, à Paris (Place d’Italie), au Havre et à Metz.
Un clap de fin amer pour de nombreux employés qui ont parfois réalisé l’intégralité de leur carrière dans l’enseigne. C’est le cas d’Aline, 61 ans. « Après 43 ans, c’est fini pour moi, je vais partir pour une retraite bien méritée. Je n’ai pas de plan ou de projet, je veux surtout profiter de mes petits-enfants et voyager », confie la vendeuse, le cœur déjà lourd de quitter ce qu’elle considérait comme « une famille ».
* prénoms modifiés
Iris Bronner