Une offre adaptée aux spécificités de chacun
Dans ce contexte où les produits sont majoritairement remboursables, les enseignes misent sur la parapharmacie pour se démarquer. Djemoui Zerari a aménagé un espace phytothérapie pour se différencier de ses concurrents. "Si vous habitez dans le quartier, que vous avez un petit problème et aimeriez quelque chose à base de plantes, vous saurez que j’aurai le choix", se félicite-t-il.
La route de Bischwiller est assez caractéristique de cette stratégie concurrentielle. À Schiltigheim, Pasteur parie sur la demande en s’adaptant à la clientèle du CMCO et un large choix de références pour nourrissons. La pharmacie de l’Arbre vert, installée depuis près de quatre-vingt ans à Bischheim, mise sur le même cheval mais développe son rayon sport avec l’espoir de capter les patients des cabinets de kinésithérapie de la zone. La gérante de la Pharmacie de la République, à Hoenheim, tire profit de son diplôme en orthopédie pour offrir un service unique dans le secteur. Son parking lui offre un avantage certain vis-à-vis d’autres pharmacies se trouvant au bord de la route. Pour rendre l’expérience de l’achat encore plus confortable, elle propose une "fenêtre drive". Un dispositif inédit qui évite les queues interminables.
Cette course aux bas prix n’est cependant pas le nerf de la guerre concurrentielle. "Sur Schiltigheim, vous prenez un produit comme le Fervex [un médicament contenant du paracétamol coûtant environ 4 euros la boîte, NDLR], entre la plus chère et la moins chère il n’y a que 40 centimes de différence", témoigne Djemoui Zerari, gérant de la pharmacie de l’Hôtel de ville. Les petites pharmacies se retrouvent également devant le problème de la diversité des produits proposés : elles ne possèdent pas des gammes comparables à celles avec plus de moyens.
"Je la regarde du coin de l'œil car elle fait la promotion de certains produits pour nourrissons auprès du CMCO." Sa suspicion, ce gérant d’une officine concurrente, la porte sur la pharmacie Pasteur. Située aux abords de la mairie de Schiltigheim, celle-ci pratiquerait la publicité, en allant directement démarcher les patientes du CMCO (Centre médico-chirurgical obstétrique) avec ses produits de maternité, d’après les dires de certains membres du personnel hospitalier et concurrents. Le résultat est sans appel : bien des jeunes parents se muent en clients.
Au-delà de la moralité, "cela relève de la légalité ou non", rappelle le vice-président de l’Ordre des pharmaciens du Grand Est, Christian Barth. La publicité en dehors de la pharmacie et le démarchage sont interdits par le code de la santé publique. "Les pharmacies veulent parfois jouer sur le même terrain que les entreprises de matériel médical qui vendent des pansements et autres produits aux hôpitaux", observe Christian Barth.
Dans sa quête de clients futurs et d’un lien privilégié avec le CMCO, la pharmacie Pasteur profiterait d’un certain brouillard déontologique. Le vice-président de l’Ordre admet que la fraude est difficile à prouver car la publicité s’affiche souvent comme de la simple communication. L’entreprise réfute toute pratique illicite et se défend d’un quelconque contrat avec l’hôpital. Elle met plutôt l’accent sur des offres de prix réduits affichées en vitrine, ce qui lui permet de se démarquer de ses concurrentes.