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09/09/14
10:47

"La BCE ne fait plus vraiment de politique monétaire"

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Le taux directeur de la Banque centrale européenne (BCE) n'a jamais été si bas : il est passé depuis jeudi 4 septembre, de 0,15 à 0,05 %. Son président, Mario Draghi, a par ailleurs fait un pas de plus vers des politiques dites non conventionnelles en annonçant le rachat, à partir d'octobre, de titres obligataires adossés à des emprunts contractés par des entreprises (les ABS, Asset backed securities). La BCE espère ainsi lutter contre les risques de déflation qui se précise après une inflation de 0,3 %, au deuxième trimestre et des perspectives de croissance de plus en plus atone. Si la nouvelle initiative de Mario Draghi a été bien reçue en France, les réactions sont plus réservées de l'autre côté du Rhin. Certaines voix critiques craignent que la Banque centrale participe ainsi directement au financement des entreprises. Explications avec Bert Van Roosebeke, chercheur en régulation financière au Centre pour la politique européenne à Fribourg.

 

La baisse historique du taux directeur de la BCE vous a-t-elle surpris ?

 

Oui, je ne m'y attendais pas. Mais je pense qu'il s'agit plutôt d'un acte symbolique. Le taux était déjà très bas. Les problèmes – surtout en Europe du Sud – sont avant tout structurels : l'activité stagne, donc les banques européennes n'ont pas beaucoup de projets d'investissement à financer. Et si la solvabilité des entreprises n'est pas bonne, la BCE ne peut rien y faire.

 

Et que pensez-vous du projet d'achat des emprunts ?

 

C'est une mesure importante. Les banques dans les soit-disants pays en crise n'ont pas suffisamment de capital parce qu'il est lié à des actifs toxiques. Si la Banque centrale rachète ces crédits, cela va libérer le capital de ces banques. Cette démarche est logique. Toutefois, elle présente des risques considérables pour la BCE qui se retrouverait avec ces actifs nocifs.

 

Cette démarche marque-t-elle une rupture de politique financière européenne ?

 

Non, la BCE s'est écartée depuis longtemps de la politique classique de la banque centrale allemande. La question décisive est plutôt de savoir quelles banques vont se voir rachetées leurs crédits. Il n'y a pas trop d'intérêt à acheter ceux de la Deutsche Bank, car elle n'a pas de problème avec l'octroi des crédits. La situation change totalement avec les banques dans le sud de l'Europe...

 

Pensez-vous que cette politique aura les mêmes impacts dans toute l'Europe, ou qu'une asymétrie va ainsi être créée entre les Etats ?

 

C'est difficile à dire. Il serait extrêmement délicat pour la BCE d'assainir les banques dans le Sud au détriment des contribuables allemands, qui financent à 18 % l'institution de Francfort. Les risques d'une telle politique sont supportés par tous.

 

En France, on a plutôt applaudi cette mesure de Mario Draghi. Les médias allemands se montrent plus réservés. Comment expliquez-vous cela ?

 

Les pays ont des intérêts très différents dans cette affaire. Les banques allemandes ne vont pas si bien, mais elles n'ont pas de difficulté pour prêter. C'est la raison pour laquelle l'achat d'emprunts ne leur est pas utile. Pour d'autres banques d'autres pays au contraire, ces mesures apparaissent importantes et raisonnables.

 

La BCE ne va-t-elle pas au-delà de ses compétences avec une telle politique ?

 

La BCE ne fait plus vraiment de politique monétaire, alors que c'est sa mission principale de la BCE. Deux visions du rôle d'une banque centrale s'affrontent donc. L'une, disons allemande, et l'autre des pays de l'Europe du Sud. La BCE doit-elle nettoyer elle-même les bilans des banques privées ? On est en droit de s'interroger. Pour l'Allemagne, la BCE a des tâches bien définies, et il y a une ligne jaune qui ne doit pas être franchie. Pour les pays d'Europe du Sud, les compétences de la BCE peuvent être plus facilement élargies. On peut alors comprendre pourquoi on soutient plutôt la politique de Mario Draghi en France, tandis qu'en Allemagne, on se montre plus réservé...

 

Propos recueillis par Manuel Fritsch

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