A cinq semaines des élections municipales, distribuer des prospectus sur les marchés est-il un bon moyen de convaincre ?
Des militants de Fabienne Keller (UMP) sur le marché de la Krutenau, mercredi 19 février (Crédits : Emmanuelle François/CUEJ)
La plupart des campagnes sont lancées et les marchés, aux heures de pointe, sont envahis par des militants qui distribuent des prospectus aux couleurs de leur champion. Le tractage est un incontournable des élections. Diffusion de message politique ou prétexte pour atteindre les électeurs, chaque équipe a sa technique pour convaincre.
"Le tractage sur le marché correspond à la manière dont on faisait campagne dans les années 90", ironise Jean-Baptiste Mathieu, organisateur des actions militantes pour Roland Ries (PS). L'équipe du maire sortant pratique une forme de tractage extensif. "Faire le même marché toutes les semaines a un effet limité : on rencontre les mêmes gens qui font leurs courses. On est de plus en plus adeptes de la déambulation, c'est-à-dire qu'on se balade dans les quartiers avec nos prospectus. On réfléchit aussi à tracter le soir ou la nuit."
"On ne veut pas que les Strasbourgeois se retrouvent avec quatre tracts dans leur cabas"
Un tractage élaboré, à l'image de celui effectué par les Verts : "Une campagne se fait en plusieurs phases, explique Bertrand Jager, organisateur de la campagne d'Alain Jund. On a beaucoup tracté au début de l'automne, puis début janvier où l'on a distribué des graines pour la nouvelle année. En ce moment, on se télescope avec les autres équipes et on ne veut pas que les Strasbourgeois se retrouvent avec quatre tracts dans leur cabas..."
D'autre équipes jouent l'omniprésence, comme les partisans de Fabienne Keller (UMP) : "On a environ 200 volontaires qui couvrent tous les marchés depuis septembre, de 8h30 à 12h", indique Jean-Philippe Vetter, le directeur de campagne de Mme Keller. Une affirmation qui ne se vérifie pas toujours sur le terrain.
Pour les candidats des plus petits partis, dont les moyens ne permettent pas de financer une campagne omniprésente et tape-à-l'oeil, le tractage a surtout pour objectif de se faire connaître. L'équipe de Tuncer Saglamer essaye de faire quatre marchés par semaine, et d'après le directeur de campagne du candidat du jeune Mouvement Citoyen de Strasbourg, cela se révèle payant : "L'accueil est meilleur qu'il y a trois semaines ; on est mieux perçus et les gens nous parlent."
A l'UDI, on se lève tôt pour sortir du lot :
Du côté du maire sortant, il s'agit surtout d'être visible, de montrer qu'on occupe le terrain. "On ne comprendrait pas que tout le monde tracte et pas Roland Ries, même si les Strasbourgeois nous connaissent", assure Thomas Riesser, qui tracte sur les marchés du centre-ville.
Mais pour la plupart des candidats et leur équipe, le tract n'est qu'un prétexte pour aller parler aux gens, sonder leurs attentes et tenter de les convaincre :
"Ce n'est pas le papier le plus important, soutient Pierrette Morinaud, tête de liste de Ligue Ouvrière, pour qui milite une vingtaine de volontaires sur les marchés ou devant les usines. Tracter nous permet de discuter et de rencontrer des gens intéressants."
Même objectif pour les militants de Fabienne Keller.
Jean-Luc Val, tête de liste du Front de Gauche, reconnaît les limites de cette technique : "On a très rarement des refus de prendre le tract, mais tout le monde ne nous accorde pas 5 minutes. C'est plutôt deux ou trois."
Alors, si le tract n'est qu'un bout de papier, pourquoi l'imprimer ?
Le prospectus est tellement important pour certains qu'ils préfèrent le déposer dans les boîtes aux lettres plutôt que le distribuer aléatoirement. Le directeur de campagne de la liste Rassemblement bleu Marine, Laurent Husser, avoue que "jusqu'ici, 90 % du tractage s'est fait par boîte aux lettres. Nous sommes très bien accueillis sur les marchés, mais le tractage en boîte aux lettres est un meilleur moyen d'informer les gens. Il faut qu'ils puissent lire nos propositions."
Réactions mitigées au passage de Jean-Luc Schaffhauser :
Images: Michael Martin/CUEJ
La méthode la plus singulière est sûrement celle d'Armand Tenesso, tête de liste de l'Union sociale et démocrate, qui refuse de militer sur les marchés : "Nous ne faisons pas de distribution sauvage dans les rues. Nous avons imprimé 40 000 tracts, qu'une quinzaine de mes colistiers vont distribuer autour d'eux, à leurs voisins ou leur famille, qui eux-même le distribueront autour d'eux." Histoire de ne pas "ventiler" ses précieux tracts.
Emmanuelle François