Dans un nouveau rapport, la Cour des comptes met en cause le modèle économique des stations de ski, menacé par le dérèglement climatique. Mais elle n’évoque pas les stations vosgiennes, pourtant concernées par les mêmes problématiques.
La station de ski du Lac Blanc, située dans le Haut-Rhin (68) à 900 mètres d'altitude, est fermée à la mi-février, faute de neige. ©Gzen92
Seules quelques stations de ski continueront de fonctionner après 2050. C’est le constat alarmant de la Cour des comptes. Elle a contrôlé 42 stations des Alpes, des Pyrénées, du Massif central et du Jura dans un rapport publié mardi 6 février. L’institution affirme que le manque de neige dû au dérèglement climatique et l’absence de plans d’adaptation suffisants menace le modèle économique des stations françaises.
Mais dans ce rapport, aucune de la vingtaine de stations vosgiennes n’est mentionnée. Elles n’ont pas eu droit à l’évaluation de leur « score de vulnérabilité », qui a été calculé « pour les 163 stations de montagne pour lesquelles les données étaient disponibles », à partir du « risque climatique », du « poids socio-économique de la station » et de « la capacité financière de l’autorité organisatrice des remontées mécaniques ».
Un manque de moyens pour contrôler les stations vosgiennes
Certes, les stations de ski des Vosges sont situées à de basses altitudes (entre 550 mètres et 1100 mètres d’altitude minimale) et ne sont pas comparables aux grandes stations touristiques des Alpes. Mais elles continuent leur activité dès que les conditions le permettent. D’autant que le rapport mentionne beaucoup de petites stations dont certaines situées dans le Massif central, où le taux d’enneigement est moindre que dans les Vosges. Selon Patrice Paul, ancien climatologue à l’université de Strasbourg, l’enneigement que l’on retrouve à 1000 mètres d’altitude dans le Massif central correspond à celui mesuré à 700 mètres d’altitude dans les Vosges. Tout n’est donc pas une question de hauteur. La situation géographique compte aussi : les Vosges sont plus au nord.
Interrogée sur l’absence de stations vosgiennes dans ce rapport, la Cour des comptes explique que la Chambre régionale des comptes du Grand Est n’a pas pris part à cette étude. Et sans le concours de la Chambre régionale, impossible de recueillir les données concernant les stations de la région. De son côté, la Chambre régionale déplore un manque de moyens pour pouvoir s’inscrire dans toutes les enquêtes de la Cour des comptes. Mais l’institution assure être vigilante à ce sujet, et vouloir s’y pencher. Sans pour autant pouvoir donner de calendrier.
Des stations qui tentent déjà de s’adapter
La question du dérèglement climatique et de son impact sur le massif des Vosges préoccupe les exploitants de stations de montagne depuis de nombreuses années déjà. En 2022, Stessy Speissmann, le maire de Gérardmer, affirmait à France 3 : « L’avenir c’est la diversification, avec un modèle quatre saisons et une offre d’activités hivernales qui fonctionnent sans neige. » Les hivers sont de plus en plus incertains, et les stations sont obligées de recouvrir les pistes de neige artificielle, dans la mesure du possible. Mi-février, seulement 10 pistes sur 33 sont ouvertes à La Bresse-Hohneck et 4 sur 21 à Gérardmer. Toutes les autres stations du massif sont fermées.
Des hivers sans neige, dans les Vosges, il y en a toujours eu, selon Pierre-Marie David, qui y mesure l’enneigement depuis 1976. Mais les « irrégularités se sont accentuées », remarque le nivologue, notamment à cause des hausses de températures. « Au-dessus de 1000 m, la diminution des chutes de neige n’est pas significative, ce qui suggère que seule l’augmentation (significative) d’environ 2 °C de la température explique cette diminution de l’enneigement », détaille-t-il dans un rapport publié en 2021.
À cause de cette baisse d’enneigement, et de l’impossibilité de n’utiliser que de la neige artificielle car il ne fait pas assez froid, la station Frère-Joseph du Ventron a définitivement arrêté télésièges et téléskis en 2020. Un plan de reprise était prévu mais, pour l’heure, frère Joseph dort toujours.
Clara Grouzis
Édité par Max Donzé