Un homme de 25 ans passait aujourd'hui devant le tribunal correctionnel pour des faits de vols avec violences. Il avait en sa possession une arme « de défense » qu'il braquait sur ses victimes.
Déjà trois quarts d’heure que le président rappelle les faits d’une voix monocorde, un sourire sibyllin venant de temps à autre animer son visage. Il faut dire que l’affaire est dense et les victimes nombreuses. Le prévenu de 25 ans, B., se tient silencieux dans son box, levant parfois les yeux au ciel quand le président revient sur certains détails. « Vous êtes venu de Marseille en fin d’année 2016, avec une voiture qui ne vous appartenait pas. Après avoir changé plusieurs fois de version, vous avez reconnu avoir volé cette voiture à un ami marseillais pour vous rendre en Alsace, où vous comptiez “changer de vie”. »
Le président enchaîne sur les faits qui ont valu au jeune homme un an de détention provisoire : en arrivant en Alsace, le prévenu contacte une jeune femme qu’il avait rencontrée sur les réseaux sociaux, mineure au moment des faits. Visiblement amoureuse, celle-ci lui propose de l’héberger. Quelque jours plus tard, le prévenu volera son ordinateur portable, qui appartenait à l’entreprise où elle faisait son apprentissage, avant de le revendre à un magasin de matériel électronique.
Puis, B. se met à dérober des téléphones portables sous la menace d’une arme. Il déniche ses cibles sur le Bon Coin, et donne rendez-vous aux vendeurs avant de leur dérober leur portable. Deux des quatre victimes se retrouvent nez à nez avec le canon d’une arme de poing. B. nie cependant les avoir menacées avec le pistolet. « J’ai volé ces téléphones pour dormir à l’hôtel et manger, mais je l’ai fait sans arme, ni violence. - Pourtant une des victimes dit que vous avez tiré la culasse de l’arme en arrière avant de la pointer sur lui : comment aurait-il inventé cette histoire ? - Je ne sais pas, je ne peux pas me mettre à sa place, mais il ment ! »
Cartouches à blanc
Lors de son interpellation, le 1er mars 2017, la police retrouve pourtant dans la chambre d’hôtel qu’il occupe plusieurs téléphones et une arme « de défense », uniquement capable de tirer des cartouches à blanc. Le prévenu reconnaît que cette arme, achetée à Marseille, lui appartient, mais continue de réfuter la version des victimes : le pistolet serait simplement tombé de sa poche lors de l’altercation avec l’un des vendeurs, mais il ne l’aurait pas utilisé. « Quand on achète une arme et qu’on se promène avec, c’est qu’on estime qu’on va s’en servir ... », intervient le procureur d’une voix ferme. « Qui est le menteur dans cette affaire, monsieur ? Les faits sont caractérisés, et ce jeune homme tente seulement d’en atténuer les circonstances pour échapper aux conséquences de ses actes. » Le magistrat du parquet précise néanmoins que le prévenu n’a aucune mention à son casier judiciaire, avant de souligner la montée en puissance dans ses actes et la gravité des faits. Il requiert trois ans d’emprisonnement dont un an de sursis avec mise à l’épreuve.
L’avocat de la défense, Me Mathias, revient sur la peine demandée par le procureur : il admet que la peine de sursis mise à l’épreuve lui paraît indispensable, mais considère l’année déjà passée en détention comme suffisante. « L’arme n’a pas été utilisée, et ces vols n’ont entraîné aucune séquelle physique : on parle donc de vols avec violences et transport d’une arme de catégorie D, qui je le rappelle, ne tire que des balles à blanc. »
En attendant le verdict, le prévenu dans son box a le sourcil haut et l’air inquiet. Le tribunal le condamne à 30 mois d’emprisonnement, dont un an de sursis accompagné d’une mise à l’épreuve, une interdiction de porter ou de posséder une arme, une obligation de travailler et une indemnisation des victimes.
Victor Guillaud-Lucet