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La représentation britannique : un service bien compris


24 décembre 2007

La représentation britannique : un service bien compris

La représentation britannique défend les intérêts de Londres auprès des eurodéputés. Sa mission : fournir des stratégies de lobbying aux ministères.

La Représentation permanente britannique (UKrep) auprès du Parlement européen se définit comme un « prestataire de services »: elle fournit un mode d'emploi du Parlement et de ses acteurs aux experts britanniques chargés de défendre la position nationale. « Nous élaborons des stratégies de lobbying auprès du Parlement pour nos fonctionnaires de Bruxelles et de Londres », explique un de ses membres. Cinq personnes travaillent à plein temps dans ce service qui dépend du Foreign Office, le ministère des affaires étrangères. Leur charge de travail s’est accrue avec la montée en puissance du Parlement européen ces dernières années. Quand Londres voit émerger un sujet important pour les intérêts britanniques dans le débat européen, la UKrep identifie les dix à vingt personnes qui comptent au sein du Parlement européen.Ce sont eux que la Représentation va cibler et tenter de sensibiliser au point de vue britannique. Rapporteurs, chefs de groupe, ou membres importants des commissions vont être approchés directement par les ministères. Peu importe leur nationalité. Les nouveaux membres de l'Union comme les Polonais sont des alliés de choix. « Nous travaillons autant avec les Britanniques qu’avec les autres », note un membre de la UKrep.

Les politiques parlent aux politiques

Dans la mesure du possible, les ministres eux-même se déplacent au Parlement pour faire valoir leur point de vue. Une habitude qui les distingue de leurs homologues français. « Les politiques aiment parler aux politiques, c'est pourquoi nous fournissons seulement des clés d'accès aux ministères. Depuis début 2006, les parlementaires ont reçu la visite d'une trentaine de ministres britanniques », se félicite la Représentation permanente. Le rapporteur fictif, membre d’une commission, est un gibier de choix. Issu de la tradition parlementaire britannnique il est chargé, lorsque le parti adverse est désigné pour rapporter au nom de sa commission, de rédiger des amendements alternatifs pour son parti. A Stasbourg, il est la cheville ouvrière du compromis entre les grands groupes politiques. Après la première lecture de la directive services, le député conservateur Malcom Harbour, investi rapporteur fictif par le PPE-DE, face à la rapporteure officielle Evelyne Gebhardt (PSE) a ainsi été particulièrement courtisé par son ministre du Travail. « La révision de la directive, soutenue par les travaillistes, était très critiquée par la presse conservatrice », explique son attachée parlementaire. Mais si les uns voulaient modifier la proposition Bolkestein, personne ne souhaitait la détruire totalement. Il fallait un compromis entre le PPE et les PSE. Et donc s’entendre au final sur des amendements qui, tout en permettant de libéraliser les services, « ne nuiraient pas aux intérêts britannniques ». Après accord sur une formulation de compromis, Malcom Harbour a donc été chargé de convaincre les eurodéputés britannniques de son groupe de s’y rallier. « Nous ne défendions pas le gouvernement de Tony Blair, souligne l’attachée parlementaire, nous plaidions seulement pour le consensus ».

Main dans la main avec les lobbies

L’influence britannique s’exerce également au jour le jour par les « briefings », équivalents des notes françaises présentant les intérêts nationaux en jeu dans les textes examinés. « Ce sont les fonctionnaires ministériels qui sont chargés de les rédiger, explique-t-on à la représentation permanente britannique. Quand un fonctionnaire est chargé d’un dossier, il doit le suivre tout au long du processus de décision européen. » La Représentation permanente britannique est aussi réputée pour travailler main dans la main avec les lobbys sectoriels. Un membre du SGAE décrit les fonctionnaires britanniques accompagnant les lobbyistes jusque dans les bureaux des eurodéputés. Inimaginable pour des Français ! « Ce n'est pas dans nos habitudes, commente-t-on à la UKrep. Mais il nous arrive de faire se rencontrer eurodéputés, fonctionnaires et lobbyistes, par exemple, avec des ONG en ce qui concerne le changement climatique ».

Josselin Huchet / Guillaume Guichard

 

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