12 février 2021
Alors que la précarité s'accroit sur fond de crise sanitaire, le Parlement a adopté un rapport sur la réduction des inégalités. Sa proposition phare: la généralisation d’un salaire minimum dans toute l’Union européenne.
“On a besoin d’un salaire minimum pour une vie digne !” a soutenu l’eurodéputée allemande Ozlem Demirel (GUE/NGL, gauche antilibérale) lors d'un débat au Parlement européen sur la réduction des inégalités en Europe, le 8 février 2021. En 2020, l’Union européenne s’était fixée comme objectif de sortir 20 millions d’européens de la pauvreté. Sans succès. Les chiffres récemment publiés par Eurostat sont même glaçants. Alors que la pandémie de la Covid 19 continue à secouer le continent, un européen sur cinq, et même un salarié sur 10, souffriraient aujourd'hui de pauvreté.
Pour lutter contre ce fléau, le rapport proposé par Ozlem Demirel, et adopté par une majorité d’eurodéputés, plaide pour l'instauration d'un salaire minimum dans tous les pays de l'Union européenne, à hauteur de 60% du salaire médian de chaque pays. Actuellement, seuls 21 des 27 Etats membres disposent d'une législation nationale qui établit un salaire minimum. Et le montant de ce dernier connaît des variations très significatives d’un pays à l’autre. A titre indicatif, il est de seulement 332 euros en Bulgarie contre près de 2200 euros au Luxembourg.
Ces écarts entretiennent des inégalités entre Etats et favorisent les pratiques de “dumping social“ qui faussent la concurrence intra-européenne. Le faible coût de la main-d'œuvre dans certains pays peut en effet pousser des entreprises à s'y installer, au dépend des pays où le travail est mieux rémunéré. L'économiste Eric Heyer estime qu’il est souhaitable que “les salaires reflètent vraiment les pouvoir d’achat nationaux“.
La balle est dans le camp de la Commission.
Selon Ozlem Demirel, l’Union européenne aurait au contraire dû agir depuis longtemps en la matière. Si elle reconnaît que “c’est une décision politique”, elle estime qu’il n’est plus acceptable de “privilégier la situation économique et la compétition entre les entreprises“ à “la situation des personnes”. “Instaurer un salaire minimum dans les pays où il n'y en a pas, c’est long” reconnaît Eric Heyer, “mais peut-être que la crise a accéléré ces procédures. Nous sommes sur la bonne voie”. Il revient désormais à la Commission européenne de décider si elle reprend à son compte les propositions du Parlement pour proposer effectivement aux Etats membres de généraliser et d’harmoniser leurs pratiques en matière de salaire minimum.
Camille Bluteau