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Le Parlement européen hausse le ton pour sauver la Grèce


15 février 2017

Les négociations d’un nouveau plan d’aide entre la Grèce et ses créanciers sont toujours au point mort. À cinq jours d’une réunion des ministres des Finances de la zone euro (Eurogroupe), le Parlement européen se saisit du sujet afin de peser sur les décisions à venir.

 

Pierre Moscovici, le commissaire européen aux Affaires économiques, est attendu à Athènes ce mercredi 15 février. L'objectif de son voyage est de débloquer les discussions sur un nouveau plan d'aide économique pour la Grèce. Depuis 2010, aucune banque privée ne veut plus prêter au pays dont la situation budgétaire est catastrophique. En 2014, sa dette publique a atteint 174,5% du PIB, soit 321,7 milliards d’euros. Aujourd’hui le poids des intérêts de la dette sur le budget grec est tel que le Fonds monétaire international (FMI) propose d’en effacer une partie pour relancer l'économie nationale. Une possibilité fermement rejetée par l’Eurogroupe (réunion des ministres des Finances de la zone euro) et particulièrement par l’Allemagne, principale puissance économique de l’Union européenne.

 

LE PARLEMENT CONSCIENT DES EFFORTS GRECS

 

Mardi 14 février, le Parlement européen s’est emparé du sujet, en organisant un débat en séance plénière. La grande majorité des eurodéputés a réclamé un allègement des ajustements économiques, qui forcent la Grèce à de nombreux sacrifices. 

Ils ont insisté sur l’urgence de la situation. Athènes dispose d’assez de fonds pour se financer jusqu’au mois de juillet 2017. Passé cette date, le pays sera dans l’impossibilité de rembourser les 7 milliards d’euros qu'il doit à ses créanciers.

L’économie grecque montre, pourtant, des signes encourageants pour la première fois depuis 2008. L’année dernière, elle a même connu une croissance légèrement positive de 0,3%. « Les chiffres d’Eurostat montrent que la Grèce a rempli ses objectifs », a souligné l’eurodéputé Dimitrios Papadimoulis (GUE/NGL, gauche radicale) défendant l’action du gouvernement de son pays. « Nous avons un excédent primaire quatre fois plus élevé que celui convenu, et en 2016, malgré les prévisions du FMI, la Grèce a enregistré une croissance positive. »

Un deuxième plan d’aide en suspens 

D'ici le mois de juillet, la Grèce doit rembourser 7 milliards d'euros à ses créanciers, essentiellement la Banque centrale européenne (BCE) et le Mécanisme européen de stabilité (MES). Pour faire face à cette obligation et éviter le défaut, le gouvernement grec a besoin d'une nouvelle restructuration de sa dette. Or, au sein de la Troïka (Commission européenne, Banque centrale européenne et FMI) et de l'Eurogroupe, certains veulent conditionner un nouveau prêt à la Grèce à l'adoption de nouvelles réformes structurelles, notamment en matière budgétaire et de marché du travail. Mais Alexis Tsípras n'est pas disposé à céder aux exigences de ses créanciers institutionnel. Le Premier ministre grec a déjà affirmé qu’il refuserait d'imposer de nouvelles mesures d’austérité à son peuple.

UN CONSENSUS POUR SAUVER LA GRÈCE

Un avis partagé par les élus du groupe S&D, l’un des principaux du Parlement européen. « Il est temps pour nous d’accompagner et d’aider vraiment le pays », a ainsi estimé l’eurodéputé française Pervenche Berès (S&D, sociaux-démocrates).

Directement pointés du doigt, certains membres du Parti populaire européen (centre-droit) ont tenu à défendre la position de l’Allemagne et de son ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, intransigeant sur la question grecque : « Il est facile de s’en prendre au gouvernement allemand. Mais le gouvernement grec n’a pas su maitriser les problèmes. La répartition des impôts est injuste et le fisc grec est inefficace » a ainsi rappelé l’eurodéputé allemand Burkhard Balz (PPE, centre-droit).

Néanmoins, pour la majorité des eurodéputés, la priorité est claire. Trouver rapidement un consensus transcendant les divergences politiques et nationales pour régler durablement le problème de la dette grecque. Mais l’approche des élections importantes en France, en Allemagne et aux Pays-Bas freine les négociations.

LE PRÉSIDENT DE L’EUROGROUPE AUX ABONNÉS ABSENTS

Les parlementaires espèrent influencer la prochaine réunion de l’Eurogroupe prévue le 20 février. Mais dans l’hémicycle, mercredi, aucun représentant de cette instance informelle n’était présent pour débattre avec eux. Longtemps annoncé, le ministre des Finances néerlandais Jeroen Dijsselbloem, également président de l’Eurogroupe, a annulé sa venue à la dernière minute.

« Le Parlement l’a invité à plusieurs reprises, et je sais qu’il a été informé.  J’imagine que son absence est liée à ses activités aux Pays-Bas. Je suis dans l’impossibilité de fournir davantage d’explications », a regretté Jaume Duch Guillot, porte-parole du Parlement européen.

La coprésidente allemande du groupe européen du groupe des Verts/ALE, Ska Keller, a, quant à elle, laissé éclater sa colère face à l’absence du ministre néerlandais : « Il a rejeté l’idée d’un débat. C’est assez scandaleux de constater qu’il n’est pas disposé à faire face à cette discussion. » Une absence symbolique qui, pour beaucoup, montre le peu de considération que les principaux acteurs de la politique économique européenne portent au Parlement européen.

Texte et photos : Simon Cardona et Naoufel El Khaouafi

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