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"Un budget ambitieux pour des politiques ambitieuses"


13 février 2020

La Commission et le Conseil sont venus, ce mercredi 12 février, défendre le budget à long terme de l’Union européenne face aux parlementaires. Au cœur des discussions : le financement du Pacte vert européen, et une réforme des ressources budgétaires.

Les députés européens font bloc face à une proposition de budget bien en dessous de leurs attentes. À une semaine d’un Conseil européen extraordinaire, réunissant les 27 chefs d’État et de gouvernement à Bruxelles, les eurodéputés ont débattu mercredi 12 février, du futur cadre financier pluriannuel (CFP), entre 2021-2027.

Pour combler le manque à gagner de 75 milliards d’euros laissé par le Royaume-Uni après le Brexit pour les sept prochaines années, le Parlement souhaite doter l'Union européenne de nouvelles ressources propres, indépendantes des contributions versées par les Etats. S’ils sont unis sur cette réforme, les eurodéputés ont bien du mal à s’accorder sur la répartition des dépenses. L’enjeu est de financer les nouvelles priorités, comme le Green Deal, ou Pacte vert européen, fixant l’objectif d’une neutralité carbone d’ici 2050, sans pour autant réduire les fonds alloués aux autres politiques.

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Johan Van Overtveldt (gauche), le président ECR de la commission parlementaire du budget et le rapporteur PPE José Manuel Fernandes (droite), ont présenté mardi 11 février leur vision du budget de l'UE.  © Claire Birague

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La Commission européenne propose un budget à hauteur de 1135 milliards d'euros, soit 1,1 % du Revenu national brut. © Léa Giraudeau

Le budget pour la période 2014-2020 arrivant à son terme, les différentes institutions de l’Union sont en effet tenues de trouver un accord final avant le 31 décembre 2020. Elles doivent adopter un budget pour 2021-2027, qui fixe dans les grandes lignes le montant des dépenses et recettes de l’Union européenne. Le Parlement demande un "budget ambitieux pour des politiques ambitieuses" et propose 1324 milliards d’euros, l’équivalent de 1,3 % du Revenu national brut (RNB) des États membres. Un chiffre bien supérieur à celui de la Commission, qui avait proposé en mai 2018 un budget de 1,1 % du RNB, soit 189 milliards d’euros de moins.

Pour créer un nouveau système de ressources propres, la Commission et le Parlement envisagent trois leviers : un impôt sur les bénéfices des sociétés européennes, une taxation du plastique non recyclé, et une taxe sur les quotas d’émission de CO2. Actuellement, 79 % des ressources proviennent des États, qui versent chaque année un pourcentage de leur RNB. Le reste est financé par les droits de douane et la TVA.

"Nous approuverons le Cadre financier seulement s’il y a un accord sur la réforme des ressources propres", a averti l’eurodéputé portugais PPE (droite) José Manuel Fernandes. L’introduction de nouvelles ressources crée des tensions entre le Parlement et le Conseil. "Des ressources propres, ça signifie forcément taxation, et il y a certains États pour qui rien que le mot taxe européenne est crispant", souligne Arnaud Danjean, eurodéputé français du PPE. Si les chefs d’État et de gouvernement ne s’accordent pas sur une telle réforme le 20 février, le Parlement pourrait refuser de donner son approbation, et bloquer le mécanisme d’adoption du Cadre financier pluriannuel. 

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a promis que 25 % du budget serait consacré à la lutte contre le changement climatique. Philippe Lamberts, président belge du groupe des Verts européens, est sceptique : "C’est une bonne nouvelle, mais si les 75 % restant aggravent la crise climatique. On est à côté de la plaque". Pierre Larrouturou, rapporteur social-démocrate français du budget est du même avis : "On veut financer un Green Deal, pas un Green Washing."

Les différents partis politiques sont néanmoins d’accord sur un point : le financement d’une transition climatique est nécessaire, mais pas aux dépens des politiques historiques. Aujourd’hui, la Politique agricole commune (PAC) est le poste de dépense le plus important (38 % du budget total). Or, elle risque de diminuer. "Toutes les puissances mondiales soutiennent l’agriculture, a défendu Jérémy Decerle, ancien agriculteur et député français Renew (centre-libéral). La transition énergétique a besoin d’une PAC à la hauteur de ses moyens." À l’inverse, les eurodéputés espèrent augmenter les enveloppes accordées à d’autres lignes de crédit, comme Erasmus. Là encore, la bataille s'annonce rude. Alors que les parlementairs proposent de tripler les moyens alloués au programme d’échange universitaire, la Commission, elle, prévoit de les doubler seulement.

Antoine Cazabonne et Juliette Fumey

Sommaire plenière février 2020

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