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Strasbourg s'interroge sur le TTIP


13 février 2015

2015 se présente comme un année clé dans les négociations du partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP ou TAFTA). L'eurodéputé socialiste allemand Bernd Lange, président de la commission du commerce international (INTA) présente le 27 février son projet de recommandations sur ces négociations, lancées en juin 2013.  Ces  recommandations du Parlement se baseront sur l'évaluation des résultats des négociations et proposeront des ajustements à la lumière des craintes soulevées par la société civile. Dix autres commissions rendront leur avis et contribueront au document préparé par M. Lange, en vue de son adoption par le Parlement en mai prochain.

Selon le vert Yannick Jadot (France), vice président d'INTA, ce projet de rapport traitera des nécessités de la transparence, des difficultés de la coopération réglementaire et de l'établissement d' instances arbitrales privées pour le réglement des différends investisseurs/États (ISDS),

Un accord "à la hausse"

"On cherche une convergence de nos normes à la hausse plutôt qu'à la baisse" avance Franck Proust (PPE, France). L'Europe devrait ainsi imposer aux Etats-Unis ses normes réglementaires élevées en matière de respect des droits sociaux et des consommateurs. Un objectif partagé par le PPE et le S&D.

Les deux principales familles politiques du Parlement soutiennent le TTIP. Pour elles, après la signature du Traité Transpacifique (TTP) l'Europe ne peut rester à l'écart dans un marché mondial où les pays émergents montent en puissance. "Si les Américains et les Européens s'entendent sur une norme commune, celle-ci s'imposera au monde, notamment aux pays asiatiques" estime Franck Proust.

Cependant le consensus entre conservateurs et socialistes est moins ferme sur l'ISDS, ces tribunaux privés censés régler les litiges entre États et investisseurs. "Beaucoup d'élus -surtout socialistes- ont compris que ce mécanisme est extrêmement dangereux et indéfendable face à l'opinion publique" constate Yannick Jadot. La Commission Européenne a publié le 13 janvier les résultats d' une consultation publique qui montrent que 88% des 150.000 répondants critiquent ce mécanisme.

Trouver une alternative à l'ISDS

"Il faut créer un outil juridique qui ne remet pas en cause les décisions d'un État, mais qui protège également nos investisseurs" plaide Frank Proust. Selon lui, une modification de l'ISDS pourrait permettre aux États de contrôler davantage ces tribunaux privés, par exemple en choisissant leurs juges. Ce type d'accommodement suscite la méfiance de la gauche radicale, qui rejette le TTIP en bloc. "Chacun comprend bien que si on rejette les tribunaux privés, le TTIP perd son sens" reconnait le français Patrick Le Hyaric (GUE), qui dit craindre par ailleurs que l'approbation d'autres accords, comme ceux signés avec le Canada ou Singapour, ne permette l'introduction de l'ISDS dans le droit européen. 

Le 21 mars le Parti Socialiste Européen se réunira à Madrid pour adopter une position commune sur l'accord transatlantique dont les prochains rounds ne sont pas encore programmés. La Commission envisage déjà deux nouvelles sessions en avril aux États-Unis puis à Bruxelles avant la pause estivale.         

                                                                                                                                                                                             Enric Bonet

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