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Elle court chaque semaine sur les rives bordées de chênes, d’érables et de châtaigniers : c’est bien mieux que de transpirer sur le bitume. “L’été, je peux y aller après le travail vers 21 h. L’hiver, j’y vais plus tôt parce que je cours seule.” C’est aussi le cas d'Auriane Schmitt, une auto-entrepreneuse de 34 ans, qui parcourt les 6 km aller-retour jusqu’au Baggersee. En chemin, au niveau du parc Schulmeister, trois jeunes sont affalés sur un banc. Rap français en fond sonore, ils discutent les yeux tournés vers l’aire de jeux déserte.

Lucie Campoy et Liza Hervy-Marquer

"Est-ce que vous êtes avec moi ce matin ?", s'écrit la choriste qui mène les louanges. Sourire aux lèvres, elle exhorte les fidèles à "acclamer Dieu" © Hady Minthé 

De l’autre côté de la rue du Général-Offenstein, le Rhin Tortu continue de s’écouler, entraînant poules d’eau et ragondins. Anne Muller, une quadragénaire de Neudorf, marche d’un pas rapide. Le maximum qu’elle s’autorise avec sa grippe du jour. 

[ Plein écran ]

Les voyageurs emmitouflés sortent de la gare pour se rendre au travail. © Clara Gross

Mais les promoteurs immobiliers ne sont jamais loin, à l'affût du moindre terrain constructible. Francis Fischer fait barrière. Hors de question de leur céder des ventes. "C’est le seul quartier résidentiel de Strasbourg où vous n’aurez jamais un immeuble dans votre cour", observe le connaisseur, qui s’est donné pour mission de garder les Villas dans leur jus.

Louisa Chausse-Dumont et Sylia Lefevre

Justement, ce qui leur plaît, c’est la boxe. Depuis plusieurs années, le cours du mardi soir du CSC connaît un engouement particulier. La rentrée de septembre a connu un vrai boom avec une fréquentation de 70 à 80 participants, contre une trentaine précédemment. Ils sont aujourd’hui une cinquantaine à s’entraîner régulièrement. Les filles notamment s’approprient ce sport traditionnellement plus masculin. Elles représentent la moitié des effectifs au CSC. Une hausse qui se retrouve à l’échelle nationale : selon la Fédération française de boxe, le nombre de boxeuses licenciées a doublé, passant de 8 400 à 17 000 depuis 2012. Quelques rues plus loin, Ness, la vingtaine, s’entraîne au Cercle Fitness trois soirs par semaine. Ce jeudi soir, après une série d’étirements, elle raconte que la boxe lui permet de travailler son cardio, plus que d’autres sports. "Mais quand tu es une fille, les garçons sont plus délicats avec toi. Pourtant, je leur dis : 'Tu peux y aller !'”, lance-t-elle, bravache.

Une offre financièrement accessible

La municipalité en place depuis 2020 a revalorisé l’aide aux licences sportives, passant de 50 à 80 euros. "Notre politique, c’est de permettre à tout un chacun d’avoir des activités sportives. Il ne faut pas que l’argent soit un frein pour les pratiquer", affirme l’élu du quartier Abdelkarim Ramdane. Mais cette aide n’est pas applicable au cours de boxe du CSC, car celui-ci ne nécessite pas d’être affilié à la fédération de boxe. L’inscription annuelle au CSC coûte en théorie 70 euros, mais de nombreux enfants et jeunes du quartier participent au cours sans adhésion. Hamed Ouanoufi le reconnaît, il ferme parfois les yeux : "On sait pertinemment qu’il y a des familles qui sont en difficulté au niveau financier et qui n’ont pas les moyens de payer. Tu fais la part des choses quand tu sais qu’un gamin n’a pas les sous… Tu ne vas pas le priver d’une activité." Pour la rentrée 2023, seuls trente-six ont payé leur cotisation. Un chiffre pourtant en augmentation : ils n’étaient que 16 inscrits en 2021, contre sept en 2022.

Marie Starecki et Lison Zimmer

La sauvegarde des Villas comme mot d'ordre

Avec Francis Fischer, les villas partent en moins de trois mois, et les gens le savent. Déjà en 1997, Brigitte Thiry, une retraitée du quartier, avait fait appel à lui pour acheter une maison rue du Rhin-Tortu : "En général, tout le monde passe par lui." "Dans le quartier, il y a très peu de biens qui m’échappent ! Ici, rue du Général-Offenstein, en trente ans, j’ai vendu près de 25 maisons sur les 50", s’enorgueillit le "faux retraité". Un monopole qu’il conserve depuis plus de vingt ans.

Francis Fischer : "Je suis un artisan de l’immobilier"

Influence des églises évangéliques en fonction de leur nombre moyen de fidèles (chiffres transmis par les pasteurs).

* Les membres de cette église n'ont pas souhaité répondre à nos sollicitations
 

compte bien y rester malgré ses difficultés à entretenir la grande maison construite par ses parents en 1958 : "C’est un quartier idéal. Mais maintenant, j’en ai assez, c’est trop de travail." Elle et sa sœur ont trouvé la solution : vendre et emménager ensemble dans un appartement route de la Meinau dont elles sont déjà propriétaires. Aux Villas, on y grandit et on y reste. Né rue Gambs, Pierre Eber a racheté la maison de ses voisins d’enfance. "L'Alsacien, une fois qu’il est enraciné, il se déracine rarement", plaisante-t-il.

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